HANDEL AGRIPPINA HAMBURG 28.V.2021
Libretto Vincenzo Grimani
Sung in Italian
Staatsoper Hamburg
28 May 2021
Nerone Franco FAGIOLI, countertenor
Poppea Julia LEZHNEVA, soprano
Claudio Luca TITTOTO, bass-baritone
Pallante Renato DOLCINI, bass-baritone
Narciso Vasily KHOROSHEV, countertenor
Lesbo Chao DENG, bass-baritone
Ensemble Resonanz
Set designer Rebecca Ringst
Costume designer Klaus Bruns
Lighting designer Joachim Klein
Dramaturg Nikolaus Stenitzer
Co-production with Bavarian State Opera, Munich, Dutch National Opera & Royal Opera House.
Anna Bonitatibus, Julia Lezhneva, Luca Tittoto (© Hans Jörg Michel)
Anna Bonitatibus (© Hans Jörg Michel)
Julia Lezhneva, Franco Fagioli (© Hans Jörg Michel)
Even with a staging lacking a little bit of inspiration, this Agrippina was pure delight and a sensational coming-back of the audience to live music mainly thanks to a dream cast!
picture: Anna Bonitatibus & Franco Fagioli (© Hans Jörg Michel)
Les théâtres sortent enfin d'un silence qui n'aura que trop duré et fait grandement souffrir toute une profession d'artistes. L'une des premières maisons d'opéra d'Allemagne à se "déconfiner" est l'opéra d'Hambourg avec au programme une œuvre baroque de haute volée: l'Agrippina de HAENDEL. Disons le d'emblée, la production de Barry KOSKY, qui a déjà bien voyagé, Munich et Londres, ne fait pas partie de ses plus belles réussites (comparativement à son phénoménal et ingénieux Saul par exemple). En effet, le spectacle, en recherche d'inspiration, tombe même parfois dans la facilité voire la vulgarité mais réserve heureusement, bon nombre de qualités: le jeu d'acteur notamment, avec une Agrippina championne de l'hypocrisie et de la manipulation, un Nerone décadent et pusillanime, etc... Voir les détails de notre compte-rendu de cette production à Londres. Et puis il y a cette gigantesque et impressionnante structure métallique qui semble se multiplier à l'infini et s'ouvrir de toutes parts, peut-être une façon de matérialiser les méandres du cerveau humain et de la complexité des sentiments des personnages. Ou encore, le manège infernal et cocasse des jeux de cache-cache dignes des Nozze di Figaro de Mozart ou bien le moment où Agrippina se transforme en chanteuse de pop musique, micro à la main et pleinement sonorisée dans son air triomphant "Ogni vento".
Dans le rôle-titre, Anna BONITATIBUS excelle de théâtralité, on se délecte des mots, de ses récitatifs investis et vibrants, on se régale de son timbre suave et addictif, de sa virtuosité sans faille (air "L'alma mia"), mais aussi de la grande tragédienne qu'elle est (air "Pensieri"). Il n'y aurait guère que quelque notes aiguës un peu forcées à lui "reprocher" (air "Ho non so che nel cor"), un détail face à une artiste d'exception.
Sa progéniture qu'elle souhaite rageusement sur le trône, trouve l'acteur idéal en Franco FAGIOLI, tout à la fois fougueux, imprévisible, déroutant, psychopathe, puceau désespéré, incestueux... et bien chantant. Cependant comme à Londres (et contrairement à la version de concert à Luxembourg chantée plus bas au diapason 415), le rôle chanté sur instruments modernes (avec une tessiture plus haute par voie de conséquence) pousse la voix sur des hauteurs qui la mettent à mal et font même émerger un aspect désagréable de son timbre. Heureusement le contre-ténor se rattrape et conquis même l'assistance grâce à un "Come nube" effréné qu'il maîtrise avec un incomparable brio, aplomb et virtuosité.
L'ennemie d'Agrippina n'est pas en reste, car Poppea trouve en la soprano Julia LEZHNEVA une redoutable rivale, dans ses manœuvres pour déjouer ses plans et la piéger. Avec une virtuosité sans pareille, des trilles à se damner, la rondeur et le volume généreux d'une voix unique, la soprano russe marque le rôle de façon indélébile.
C'est le phénoménal contre-ténor Christophe DUMAUX qui interprète avec force et sensibilité le rôle d'Ottone avec en point d'orgue la déchirante scène dans laquelle il se fait injustement rejeter et accuser de traitre. Scène qui culminera dans un air poignant à vous tirer les larmes "Voi che udite".
Claudio, quant à lui trouve en Luca TITTOTO son interprète de rêve. Jamais le rôle n'aura été aussi bien chanté et chacune de ses interventions aura marqué la soirée.
Les trois petits rôles Pallante, Narciso et Lesbo, respectivement chantés par Renato DOLCINI, Vasily KHOROSHEV et Chao DENG, n'appellent que des éloges.
Au final, une reprise du spectacle vivant avec une Agrippina passionnante grâce à une formidable équipe de chanteurs soutenue par un Riccardo Minasi de bonne inspiration.