HANDEL ALCINA KASSEL 7.VII.2021

HANDEL: ALCINA, dramma per musica in 3 Acts by Georg Friedrich HANDEL

semi-staged

Kassel, Staatstheater 07.VII.2021 (premiere, 3 performances)

Staatsorchester Kassel

Conducted by Jörg Halubek (harpsichord)

Costumes: Charlotte Werkmeister 

Lights: Albert Geisel 

Staging: Dr. Ursula Benzing 

Alcina: Elizabeth Bailey, soprano© N. Klinger 
  • Morgana: Lin Lin Fan, soprano
© N. Klinger 
Oronte: Younggi Moses Do, tenor© N. Klinger 

          To end the season, the Kassel Theater scheduled an improved concert version of the opera Alcina by HANDEL, with its beautiful background lights, nice costumes and manages to offer a successful performance, avoiding any posible boredom (difficult without settings and complete staging). A success mainly due to a balanced and rather good cast (excellent Elizabeth BAILEY as Alcina and amazing Younggi MOSES DO as Oronte) under the precise direction of baroque specialist Jörg Halubek. 

          Alors que la saison d’opéras touche à sa fin et que presque toutes la programmation a été annulée suite à la pandémie mondiale de coronavirus, le théâtre de Kassel propose, en ces temps de timide déconfinement un dernier opéra avant de fermer ses portes pendant la période estivale: 3 représentations d’Alcina de Haendel, en version de concert améliorée (projection de lumières chatoyantes en arrière-plan, chanteurs en costumes (contemporains mais rehaussés ça et là, de fort jolies fleurs ou papillons) et un jeu de scène distancié, simple mais efficace. 

          L’orchestre positionné en fond de scène bénéficie d’une direction attentive et rigoureuse de la part du chef spécialiste Jörg HALUBEK (avec d'inattendus petits interludes musicaux en guise de transitions). Les solistes sont ainsi mis à l’honneur sur l'avant-scène, soucieux de chanter équitablement sur toute sa longueur. Tous ces efforts combinés concourent à offrir un spectacle somme toute réussi tout en évitant l’ennui. 

          Cette réussite revient en grande partie aux solistes vocaux de la soirée avec notamment une remarquable Alcina en la personne d'Elizabeth BAILEY, qui surprend par son aisance, sa technique assurée et sans efforts et une interprétation subtile et sensible d'un personnage à fleur de peau. On se délecte de ses mezza-voce, de l´elegance de son phrasé. Les notes aiguës sont faciles et agréables, les récitatifs sont vibrants, les airs émouvants et les da capo tellement personnels. Toutes ces qualités font d’Elizabeth BAILEY une grande Alcina. On déplorera peut-être une légère déficience de notes graves notamment dans le fabuleux air « Ombre pallide » (malheureusement privé de son da capo). 

          Sa sœur Morgana, interprétée par la soprano Lin Lin FAN assure honorablement sa partie, capable d’interpréter efficacement le fameux et pyrotechnique air « Tornami à vagheggiar » mais surtout à nous toucher dans ses deux airs lents, l’un accompagné d'un admirable violon solo "Ama, sospira", l’autre par le solo langoureux et suave du violoncelle "Credete al mio dolore". Un texte pas toujours clairement déclamé cependant.

           C’est le ténor Younggi MOSES DO, dans le rôle d’Oronte, qui se distingue le mieux: la surprise de la soirée ! Les qualités sont nombreuses: timbre clair et fort séduisant, voix longue, facilités de l’aigu ainsi que des vocalises, mais aussi un personnage attachant car avec seulement trois airs il fait le show, sans trop en faire, juste ce qu’il faut avec cette énergie toute communicative et même cette petite touche jazzy dans la reprise de l’air "E' un folle" qui vous ferait danser sur votre siège. Mentionnons aussi sa touchante sincérité et simplicité dans l’air « Un momento di contento ».

          Le mezzo-soprano enjôleur de Marta Herman fait des étincelles dans le rôle de Bradamante. Sa facilité à vocaliser fascine et rend passionnant chacun de ses airs notamment l’air virtuose « Vorrei vendicarmi ». Peut-être aurait-il fallu l’affubler de ses vêtements féminins dans son dernier air « All’alma fedele », son accoutrement masculin n’était pas des plus heureux. 

          La déception viendra du rôle de Ruggiero, incarné par la mezzo-soprano Maren ENGELHARDT, avec cette émission inégalement projetée, un manque de notes graves, un style pas toujours bien maîtrisé, des vocalises scabreuses dans l’air héroïque « Sta nell Ircana » et un chant souvent scandé avec de nombreuses prises d’air dommageables au texte. Reste heureusement une belle véhémence vocale qui confère caractère et grandeur au personnage. 

          Enfin, le baryton Daniel HOLZHAUSER, assure honorablement sa partie avec son seul air «Pensa a chi geme » même si sa voix a tendance à détimbrer. Ce rôle mineur fonctionne encore mieux avec une basse qui peut impressionner par ses notes caverneuses et susciter plus encore la prise de conscience de Ruggiero.

          A noter que le rôle du petit Oberto à la recherche de son père a été supprimé ainsi que certains airs ou da capo. Par ailleurs notons le travail admirable des da capo, fioritures et cadences, souvent très personnelles (et non calqués sur ceux connus des disques comme on l'entend trop souvent). Soulignons aussi quelques touches d’humour bien appréciables telles que la réaction de Bradamante qui souhaite repousser les avances insistantes de Morgana et prétexte la distanciation sociale liée à la situation sanitaire.

           Un spectacle qui aura fait le bonheur d’un public ravi de retrouver l’opéra vivant (l’offre vidéo, certes nécessaire depuis plus d'un an, a fini par saturer), à en croire ses applaudissements compulsifs. 

Alcina: Elizabeth Bailey, soprano© N. Klinger 
Ruggiero: Maren Engelhardt, mezzo-soprano© N. Klinger 
Bradamante: Marta Herman, mezzo-soprano© N. Klinger