Comptes rendus

NOVEMBRE 2024

Partenope : Jessica Niles 

➡️ FRANCFORT        16.XI.2024     Haendel Partenope

Un petit grain de folie s'est emparé de l'opéra Partenope

          Un spectacle sciemment déstabilisant, bouillonnant, qui d’emblée part dans tous les sens, détonne et surprend. Des danseurs semi-nus occupent l’espace et font le show. Les costumes, sans cohérence, vont du guerrier grec à l'élégance XVIIIe siècle. Un imbroglio pensé comme une douce folie visuelle par les soins de la jeune metteuse en scène Julia Burbach. Les personnages prennent tout à la légère et plongent le spectateur dans une atmosphère légère et divertissante à la Goldoni. Ils évoluent au cœur d’un manège : une scène circulaire en mouvement surmontée d’un panneau en demi-cercle en guise de mur de fond de scène. Un rideau, fait de longues lamelles légèrement transparentes, coulisse de temps à autre jusqu'à recouvrir la scène, permettant ainsi diverses entrées et sorties. Un jeu de rêverie et de réalité opère alors. il donne l’impression que tout n’est que fête et légèreté à l’intérieur et réalité à l’extérieur. Un effet qui se renforcera durant la seconde partie comme si ce monde enchanteur prenait petit à petit un caractère de plus en plus sérieux et de moins en moins léger. Les sentiments des personnages se renforcent et l’on est subitement touché par leur sincérité. Ceci dit, la trame de l'opéra reste bien opaque si l’on n’est pas en capacité de lire les surtitres en allemand. Il faut dire qu’il est difficile de traiter un livret quasi indigent qui se résume à un imbroglio amoureux alambiqué : Partenope est amoureuse d’Arsace qui l’est en retour mais aime aussi Rosmira et ne sait laquelle choisir. Partenope est également courtisée par Armindo qu’elle finira par épouser…

➡️ MADRID        15.XI.2024     Haendel Theodora 

Entre fascination et dégoût 

           Les productions de Theodora se succèdent et s’ajoutent à la collection des déceptions. Pas moins de 5 DVDs pour l’œuvre la plus empreinte de piété de Georg Friedrich Haendel et aucune n’arrive à la cheville de la mythique production de Glyndebourne mise en scène par les soins du génial Peter Sellars. Un spectacle qui avait notamment révélé le contre-ténor David Daniels. Et cette coproduction entre Madrid et Londres, imaginée par Kathie Mitchell n’arrange rien : une transposition contemporaine qui se déroule vraisemblablement à l’ambassade de Rome avec un Valens corrompu par l’argent, 'consommateur' abusif de femmes (prostituées), et exécrable avec son personnel surtout féminin. Le combat religieux défendu par le livret semble complètement anéanti, remplacé par le combat féministe. Theodora et Irene se rebiffent et seront sévèrement punies pour avoir fomenté un attentat à la bombe. Pire que la mort, Theodora qui travaille en cuisine, sera condamnée à la prostitution. Même si l’on reste perplexe par le concept, le point fort de cette mise en scène réside dans son traitement cinématographique. On a l’impression de visionner un film policier, les bons et les méchants se confrontent à coup d’armes à feu. L’impressionnante enfilade de pièces (on passe des cuisines, au salon, à la salle des plaisirs, à la chambre, puis en chambre froide) défilent à l’horizontale comme une pellicule cinématographique que l’on déroulerait et scruterait à la loupe. Deux scènes font l'objet d'un traitement particulièrement et sciemment provoquant voire choquant : celle où Theodora chante son sublime air intimiste 'With Darkness deep' dans cette pièce capitonnée rouge dédiée à la luxure, accompagnée de deux prostituées s’adonnant à des figures de pole dance. Et celle dans la chambre froide, dans laquelle Theodora et Didymus sont traités comme ces carcasses de cochons accrochées pour consommation ultérieure. On est alors partagé par l'intention louable voire fascinante de Katie Mitchell à montrer une réalité forte et prégnante et le résultat quelque peu dégradant. En effet, les deux moments les plus sublimes de la partition s'écoutent dans un cadre repoussant voire écœurant.  

Theodora au Teatro Real de Madrid



➡️ LAUSANNE       08.XI.2024     Haendel Alexander's Feast

Une splendeur !

          Une œuvre rare qui coule pourtant dans les veines du Concentus Musicus Wien depuis quasiment ses débuts sous la direction du très regretté Nikolaus Harnoncourt. Pas moins de deux enregistrements cd à leur actif (l'un date de 1977, l'autre de 2012). Les aficionados ne manqueront pas de se procurer la diffusion télévisée du concert de 2012. 

Au même titre que certaines cantates (en réalité de mini opéras) telle que Aci, Galatea e Polifemo sont de véritables bijoux, Alexander’s Feast, chef d’œuvre haendélien absolu, relève du mini oratorio. À croire que cette forme réussissait particulièrement au Caro Sassone. On pense par exemple à Esther.

Le festin d’Alexandre n’est autre qu’une Ode à la Ste Cécile, patronne des musiciens. Il met en scène Alexandre Le Grand et sa maîtresse Thaïs dans la cité de Persepolis où ils ont organisé un banquet. Ils ont convié, pour l'occasion, le musicien Thimotheus pour les divertir. Celui-ci éveille chez ses convives différentes émotions clairement reproduites par la rhétorique baroque.

➡️ STRASBOURG     6.XI.2024     Haendel Ariodante 

Transposition contemporaine plaisante mais loin d’être captivante 

                  Un spectacle qui débute par un flash-back (hors livret) imaginé par la metteuse en scène Jetske Mijnssen. Le spectateur se retrouve quelque 15 ans avant le début de l’opéra de Haendel, au cœur d’une maison cossue, dans un salon tout à la fois classieux et sobre, couleur bleue pastel. On assiste alors à des jeux d’enfants : la petite Ginevra, parée d’une robe de mariée, défile fièrement au bras de son amoureux Ariodante. Mais leur "union" suscite la jalousie de Polinesso ainsi que celle de Dalinda. Et les jeunes garçons finissent par se défier à l’épée. Devenus adultes, Dalinda et Polinesso semblent avoir une revanche à prendre. Une transposition dans les années 1960s qui fait la part belle aux costumes et aux coiffes de cette époque. Le roi d’Ecosse n’est ici qu’un vieux monsieur grabataire à l’autorité incontestable, il est en permanence suivi d’un infirmier, Lurcanio. La transposition posée, nous assistons alors aux préparatifs de mariage : les domestiques s’affairent pour que tout soit au cordeau. 

Dans la deuxième partie, la pièce principale sera rétrécie et laissera paraître une multitude d’autres pièces et de portes, le tout présenté astucieusement. Un clin d’œil avec ce qui se pratiquait à l’époque du Caro Sassone : les châssis alignés latéralement pour créer une perspective infinie. 

Nous tenons là les deux bonnes idées de cette mise en scène : avoir su montrer les origines du problème dans la première partie et avoir présenté des décors à l’inspiration baroque dans la seconde. 

Insuffisant pour rendre ce spectacle passionnant car le déroulé reste avare d’actions intéressantes : Ginevra chante son air en arrangeant des fleurs dans des vases, Ariodante chante son air de bravoure en serrant fort la robe de sa Ginevra sur sa poitrine, le roi chante ses vocalises au rythme de ses spasmes, etc… D’aucuns pourront trouver le temps long et le spectacle bien terne. 

ARIODANTE à l'Opéra du Rhin

OCTOBRE 2024

Photos Bill Lam
Luigi De Donato, Fleur Barron & Lucy Crowe.
La Nuova Musica 

➡️ LONDRES        29.X.2024     Haendel Aci, Galatea e Polifemo

Incandescente interprétation 

                    La mythique salle du Wigmore Hall de Londres accueillait en ce mardi 29 octobre 2024 l’ensemble britannique (qui porte un nom italien) La Nuova Musica et son fougueux chef David Bates pour nous offrir un bijou de jeunesse de Haendel : Aci, Galatea e Polifemo. Une sérénade ou pastorale d’une durée d’1h30 environ qui met en scène les amours du berger Acis et de la nymphe Galatée, convoitée par le cyclope Polyphème. Ce dernier finira par éliminer son rival d’un jet de rocher. Galatée, brisée par la douleur, transformera son Acis en un ruisseau.           

          Le fait que le berger Acis soit chanté par une soprano et Galatea par une contralto pouvait être source de confusion pour le spectateur non averti. 

          Version incandescente que nous offraient des interprètes mus par une rageuse interprétation. 

          Lucy Crowe, vibrant Acis, fait des merveilles dans les da capo avec un festival de notes hautes et piquées. Son ‘Qui l’augel’ accompagné du hautbois puis de la flûte a déclenché une salve d’applaudissements méritée. Fleur Barron nous a gratifiés de son timbre particulièrement sombre et capiteux. Une très heureuse découverte ! Enfin Luigi De Donato, Polyphème incomparable, un habitué du rôle, a fait sensation en bravant avec brio les difficultés vocales d’une partition quasi inhumaine. 

          L’œuvre s’est étonnamment achevée sur le récitatif d’un Polyphème bien méditatif, le chef faisant fi du chœur final festif que Haendel a prévu. Une façon de renforcer la fibre dramatique de l’oeuvre. Le chœur final sera donné en bis. 

                                       Ruggero Meli

➡️ ANVERS        25.X.2024     Gluck Iphigénie en Tauride 

Une réussite si ce n'est la mise en scène ! 

         Transposition contemporaine du drame mythologique grec avec des moyens qui semblent d’emblée bien limités. Quelques marches en guise de sièges d’une salle de théâtre. Le public affublé de vêtements de ville assiste à la représentation théâtrale (en néerlandais) d’une tragédie grecque mettant en scène Agamemnon et une Clytemnestre particulièrement révulsée. Une scène rageuse, conflictuelle, à laquelle assiste leurs enfants traumatisés. C’est la fin du spectacle et le public applaudit avec ferveur lorsque soudain une violente explosion retentit. Le plafond s’écroule, la foule en panique et ensanglantée tente de fuir, mais les assaillants font irruption, massacrent et nous assistons même à deux viols perpétrés par Thoas. 

C’est la guerre (certainement une référence au début du conflit russo-ukrainien, lorsqu’une bombe russe était tombée sur le théâtre Marioupol). Même si le lien reste bien ténu entre le drame d’Iphigénie et la guerre russo-ukrainienne, nous supposons que ce sont ces atrocités qui éveillent les souvenirs traumatiques d’Iphigénie. On imagine aussi que les ‘terroristes’ veulent la contraindre à exécuter Oreste ou Pylade sans qu’elle sache que l’un d’entre eux n’est autre que son frère. 

l'une des scènes de la production de Rafael R. Villalobos  © Annemie Augustijns 

➡️ BÂLE     18-20.X.2024 L'ensemble La Cetra fête ses 25 ans.

          Des concerts flamboyants

          Pour fêter dignement ses 25 ans d’existence, l’ensemble de musique baroque de Bâle La Cetra a concocté pour son public, un week-end de trois jours de concerts festifs du vendredi 18 au dimanche 20 octobre 2024. 

Le premier concert mettait à l’honneur les qualités exceptionnelles de l’ensemble La Cetra sous la direction incandescente du chef Andrea Marcon avec des invités qui ont contribué à son rayonnement international. 

Bien entendu, le programme faisait la part belle aux compositeurs qui ont fait la renommée de l’ensemble : Vivaldi, Haendel et pour commencer Bach...

➡️ ZURICH     17.X.2024

                                                  Serse complètement psychédélique

          Deux blocs d'appartements qui se meuvent au gré des pièces occupées. L'un cossu, habité par le très élégant et fortuné Serse, l'autre plus chaotique, occupé par son frère et rival Arsamene, au look rock n'roll 'destroy', qui vit apparemment en cohabitation avec des acolytes plus extravagants encore. L'imbroglio amoureux peut alors commencer avec son lot de quiproquos et ses situations burlesques. Le tout réglé sur un rythme infernal sans jamais que le spectacle ne s'essouffle. La légèreté et le spectaculaire (une fête de mariage complètement loufoque voire déjantée) côtoient l'intimisme du désespoir ou de la rageuse jalousie des personnages. Un mélange savamment dosé par la metteuse en scène Nina Russi qui nous fait passer du rire aux larmes. La scène de la fête d'anniversaire de Serse, avec ses costumes loufoques, ses personnages atypiques, et sa démesure, aura certainement été le highlight de la soirée. 

Serse : Raffaele Pe, contre-ténor

➡️ CHANTILLY   12.X.2024 

                                             Concert floral à Chantilly : une merveille !

           Pour faire écho aux Journées des Plantes du Château de Chantilly, le jeune festival de musique de Chantilly a invité les prestigieux Talens Lyriques dans un programme à la thématique florale absolument exquis et concocté spécialement pour l’occasion. 

          Une première partie d’airs de Georg Friedrich Haendel qui sentaient bon la rose et une seconde qui mettait en scène la rencontre sulfureuse entre un Apollon courtisan et insistant voire lascif et une Dafne fuyante, qui finira par se transformer en laurier afin d’échapper à son suborneur.

          Deux chanteurs émérites pour illustrer cette rencontre : la mezzo-soprano Ambroisine Bré, ici dans un rôle de soprano et le non moins talentueux baryton-basse Nahuel Di Pierro. Tous deux nous ont fait vivre avec passion un jeu de séduction absolument irrésistible. 

➡️ FRANCFORT     10.X.2024 

                                             Hercules minimaliste et sciemment avare

          Du point de vue du décor : quatre planches (faites de panneaux de bois à l'état brut, marron clair) encadrent la scène et assise sur un canapé, la statue d’Hercules trône sur le côté droit de la scène. Dans la deuxième partie, un panneau, qui a été retiré, laisse entrevoir un morceau de ciel, le canapé a disparu et une nouvelle statue d’Hercules se tient debout, toujours sur le côté droit de la scène. Un rideau couleur crème recouvre toute la surface du panneau de fond de scène. Les costumes sont quelconques, voire laids pour certains.

Un spectacle volontairement resserré sur le drame et qui tente d'éliminer tout ce qui pourrait le parasiter (décors, costumes) pour se retrouver au plus proche des sentiments des personnages et de la figure d'Hercules (c'est le personnage qui a le moins à chanter, pourtant il est omniprésent et reste au cœur du drame). Voilà certainement les intentions du metteur en scène Barrie Kosky. Seulement, le résultat n'atteint pas vraiment la hauteur de ces louables intentions. Il donne plutôt le sentiment de décors à l'économie, d'une esthétique sabotée, de pauvreté des idées, de facilité voire de malhonnêteté intellectuelle.

Paula Murrihy (Dejanira) & Giulia Semenzato (Iole)© Barbara Aumüller

➡️ ROYAUMONT     6.X.2024 Un festival qui se termine en Beauté

          Le temps s'arrête à Royaumont

          Le Triomphe du Temps, c’est le titre donné à cette dernière journée du festival de Royaumont : une façon de nous susurrer que tout touche certes à sa fin, mais que les graines des prochains concerts et donc du prochain festival sont déjà semées. Et la transmission est assurée (le jardin des voix de William Christie) au milieu de ce décor intact de vieilles pierres à l'âme musicale. 

Deux concerts au programme : l’un entièrement consacré au clavecin avec un Francesco Corti survolté, l'autre lyrique avec le bijou de Haendel, l'oratorio Il Trionfo del Tempo e del Disinganno.

SEPTEMBRE 2024

13e édition du Concours de Chant Baroque de Froville
A l'issue de la remise des prix (c) Luc Tripotin
Les sept membres du jury présidé par la soprano Giulia Semenzato

➡️ FROVILLE    Finale du Concours de Chant Baroque 22.IX.2024 

Une étoile est née : Lucija Varsic 

          La finale du concours de chant baroque de Froville n’a pas déçu. Un niveau particulièrement élevé cette année, et des chanteurs déjà confirmés pour la plupart. Le public, constitué de fins connaisseurs, a pu ainsi assister à une compétition particulièrement savoureuse, et voir se succéder de brillants artistes.

Six candidats (3 sopranos, 2 mezzo-sopranos et 1 contre-ténor) sont venus défendre valeureusement leurs chances en interprétant trois airs baroques choisis principalement parmi trois compositeurs : Monteverdi, Vivaldi et Haendel.

Nous retiendrons surtout le mezzo-soprano, voire le contralto, chaud et capiteux de Lorrie Garcia qui a obtenu une belle troisième place. Une artiste qui se produit déjà régulièrement avec l’ensemble qui accompagnait cette finale du concours : I Gemelli. Elle aura marqué le concours de son charisme et de sa forte présence scénique. Peut-être aurait-elle mérité une deuxième place. Mais le contre-ténor Arnaud Gluck, dont la voix nous a semblé encore un peu « verte », lui a ravi cette luxueuse deuxième place grâce notamment à un air de Bach qui a véritablement placé le public en lévitation. En effet, l’artiste a su créer l’émotion en prenant sa voix la plus éthérée et une mezza-voce particulièrement aérienne. Un air qui a sans doute fait pencher la balance en sa faveur car Lorrie Garcia chantait ce même air avec moins d’émotion. Notez que le contre-ténor a également obtenu un prix spécial de la part de l’ensemble I Gemelli

Enfin, la première place a sonné comme une évidence. Nous avions déjà remarqué la mezzo-soprano Lucija Varsic tout récemment au concours Cesti d’Innsbruck et nous étions tombé amoureux de cette voix d’une rare élégance et l’avions placée grande gagnante. Pourtant Innsbruck en a décidé autrement puisque elle n’a pas eu droit au podium, mais a tout de même obtenu un rôle dans une production. Bien lui a pris de se présenter au concours de chant baroque de Froville puisqu’elle a fait l’unanimité : prix du public et 1er prix ! Dotée d’un mezzo souple et long, l’artiste s’est distinguée dans le cantar parlando limpide de Monteverdi, les méandres aisément déjoués de Bach et les vocalises faciles et brillantes de Haendel. Une artiste à suivre absolument. 

Seul regret, le départ bredouille de la soprano Maud Bessard-Morandas qui aurait mérité un prix pour sa fougue communicative, son charisme, son soprano brillant notamment dans un ‘In Furore’ de Vivaldi de haute volée porté avec une fougue communicative par l'orchestre I Gemelli, dont le premier violon n'est jamais parvenu à trouver sa parfaite justesse. 

                                         Ruggero Meli

➡️ Liège     6 septembre 2024 

Entre ciel et terre.
L'ensemble Musica Gloria ouvre la 67e édition du festival Les Nuits de Septembre avec enthousiasme. 

                    Depuis 67 ans, le festival Les Nuits de Septembre (dans le cadre du festival de Wallonie) offre un large panel de concerts fort intéressants. Cette année, les festivités ont débuté en l’église Saint-Jacques de Liège, un large édifice à l’architecture gothique absolument somptueuse, ce vendredi 6 septembre 2024 avec un concert baroque entièrement dédié au compositeur Georg Friedrich Haendel. Au programme, les rares Chandos Anthems écrits entre 1717 et 1718 lorsque le compositeur devient « artiste en résidence » à Cannons, la demeure de James Brydges, Comte de Chandos, un aristocrate et un mécène. Il s’agit d’une série de onze antiennes dans lesquelles des psaumes sont mis en musique. L’ensemble Musica Gloria en proposait deux : la 10e, intitulée ‘The Lord is my light’ HWV 255, dans laquelle on peut entendre les éléments se déchaîner, ainsi que la 6e, intitulée ‘As pants the hart’ HWV 251b, dans laquelle une foi indéfectible en Dieu est louée. 

Ensemble Musica Gloria

AOÛT 2024

Kathryn Lewek et Benjamin Bernheim dans Les Contes d'Hoffmann dans la production de Mariam Clément au festival de Salzbourg.Copyright : Monika Rittershaus 

➡️ SALZBOURG     21 août 2024 

Les Contes d'Hoffmann au cinéma 

          Mariame Clément a souvent le chic pour trouver les concepts ingénieux qui vont valoriser et pimenter les ouvrages opératiques auxquels elle s’attaque. On repense par exemple à sa géniale Agrippina et sa contextualisation tout droit sortie de la mythique série américaine Dallas. Avec ces Contes d’Hoffmann salzbourgeois, elle reprend le contexte cinématographique et transpose l’opéra dans un premier temps dans l’envers du monde du 7e art : les entrepôts puis la cantine des artistes pour enfin se retrouver au cœur de tournages de cinéma. Son idée permet de créer toutes sortes de fantaisies et de rendre crédible des choses qui le seraient moins dans un autre contexte. Après tout, ces Contes d’Hoffmann ne sont que rêveries, introspection, pensées sublimées, poésie, etc… Le cinéma permet toutes les folies de l’imagination et finalement du livret de Jules Barbier. 

JULLET 2024

Eugénie Lefebvre, soprano & Louis-Noël Bestion de Camboulas

➡️ Festival du Haut Limousin 31 juillet 2024 

Déambulations musicales dans les rues de Le Dorat : une journée passionnante avec l'ensemble Les Surprises 

          Concert de 11h : Porte-à-porte musical

          Partis de l'Office de tourisme, nous voilà embarqués, de façon complètement inattendue, à la découverte à pieds de la jolie ville de Le Dorat en compagnie d'un guide mais aussi de deux talentueux membres de l'ensemble baroque Les Surprises. Ensemble, le public découvre les monuments, les commerces et certains lieux de vie de la ville. Un parcours complètement improvisé, au gré des opportunités, qui nous emmène chez le coiffeur puis chez la vendeuse de vêtements, sous les fenêtres d’une habitante collectionneuse de porcelaines, à la terrasse d’un café, ou chez des particuliers qui nous accueillent dans des jardins privés absolument somptueux, pour vivre des instants musicaux fugaces surprenants. Des moments de grâce où le temps semble s'immobiliser. 

JUIN 2024




➡️ SAINT-MICHEL EN THIERACHE       Catherine Trottmann & Marina Viotti 30.VI.2024  

Deux somptueux récitals 

          Tous les ans, le festival de Saint-Michel en Thiérache jouit d’une programmation à se damner. Difficile de choisir l’un des cinq dimanches proposés. Après la venue exceptionnelle de Malena Ernman que l’on pensait définitivement sortie du circuit en ouverture du festival, c’est le dimanche 30 juin que se produisaient deux fabuleuses chanteuses lyriques : la soprano Catherine Trottmann et la mezzo-soprano Marina Viotti, accompagnées de deux ensembles pas moins fabuleux, en l’occurrence Il Caravaggio sous la direction de la claveciniste Camille Delaforge et Les Musiciens du Louvre sous la baguette de Marc Minkowki. Toutes deux se produisaient dans un  programme presque exclusivement consacré au roi du baroque Georg Friedrich Haendel. Les amateurs de sensations fortes et de montagnes russes des sentiments n'auront pas été déçus de voyager dans cet univers où les passions et les sentiments sont délicieusement exacerbés. . .  

➡️ HARDELOT Midsummer Festival 20-29.VI.2024  

Un programme de haute volée avec des surprises

          Chaque année, fin juin, le château d'Hardelot célèbre l'arrivée de l'été au son de la musique baroque. Ce festival au nom poétique inspiré par Shakespeare et sa pièce A Midsummer Night's Dream explore les liens musicaux qui unissent la France et la Grande-Bretagne. Il se déroule au sein du magnifique théâtre élisabéthain en bois édifié au pied des murailles du château et accueille les plus brillants artistes de la scène baroque actuelle dans une ambiance conviviale, détendue et d'amour pour la musique en général. Poursuivez la lecture ici

affiche du Midsummer Festival du Château d'Hardelot 2024
scène de L'Olimpiade de Vivaldi au Théâtre des Champs-Elysées

➡️ PARIS 20.VI.2024   Des Olympiades aux résultats inégaux 

                    L’occasion était trop belle pour la manquer. Aussi le Théâtre des Champs Elysées a-t-il programmé ses propres Jeux Olympiques à quelques jours de l'ouverture des Jeux de Paris, avec l’opéra L’Olimpiade de Vivaldi, dans un spectacle imaginé par Emmanuel Daumas. Un décor de salle de sport avec testostérone, biceps et entraînements intensifs à profusion. Des athlètes survitaminés réalisent des figures techniques spectaculaires. En parallèle, le spectateur se retrouve au cœur de la Grèce Antique et ses créatures légendaires : le Minotaure, la pythie de Delphes… Difficile de suivre le lien de ces thématiques. D’autant que les costumes n’aident pas vraiment à clarifier les choses.  

AVRIL - MAI 2024

➡️ VERSAILLES Mozart L'enlèvement du sérail 22.V.2024  

Un conte digne des 1001 nuits 

          Spectacle entre rêve et réalité, entre bande dessinée et réalisme. Le spectateur passe aisément de la légèreté du conte des Mille et une Nuits d’Aladin et son tapis magique à des sujets plus brûlants actuels : le harcèlement de la femme et sa soumission à l’homme, la femme moderne qui se rebiffe et revendique sa liberté. L’homme macho est tourné en dérision. C'est une ode à la liberté. 

          Les couleurs sont chaudes et multiples tout comme les costumes flamboyants des choristes. Les décors sont simples et ingénieux à la fois. Belmont cherche le moyen de franchir la haute muraille des jardins du palais de Bacha dans lequel sa belle est emprisonnée. Une muraille qui prendra la forme d'un pont, celui du pont des soupirs peut-être, une fois que ses arches auront été élégamment ajourées. .  

scène de L'Enlèvement du Sérail à Versailles
Berenice : Sandrine Piau

➡️ PARIS 21.V.2024   La très rare Berenice de Haendel enflamme le Théâtre des Champs-Elysées 

                    En ce mardi 21 mai 2024, le Théâtre des Champs-Élysées proposait une rareté haendélienne : l’opéra Berenice. Oeuvre  négligée, certainement pour son écriture inégale : certains passages frisent l’ennui quand d’autres réservent de très jolis moments de musique, le tout au cœur d’un imbroglio politico-amoureux. 

          L’ensemble Il Pomo d’Oro en proposait sa vision en version de concert rehaussée par une distribution de haut vol dans laquelle la jeune génération côtoyait l’ancienne. Le contre-ténor montant Paul-Antoine Bénos-Djian incarnait un Demetrio idéalement vibrant d’émotion, à la fois touchant et vindicatif, tandis que la mezzo-soprano Arianna Vendittelli enflammait la scène par son incarnation incandescente d’Alessandro, un romain épris de Berenice. Chacune de leurs interventions a été marquante. 

➡️ LUCERNE Vivaldi Giustino 02.V.2024  

Giustino et son divin psaltérion 

          Un mariage particulièrement festif vire exsangue suite à une déclaration de guerre. Voilà comment commence le spectacle imaginé par Markus Dietz et son équipe. La couleur blanche vire au rouge et la perfection d’un décor immaculé subit une destruction progressive. Le tout dans un imbroglio politico-amoureux plein de rebondissements. Le spectateur suit avec une certaine aisance les péripéties qui sont assez fidèles au livret de l'opéra de Vivaldi. Une fois n’est pas coutume, les protagonistes ne sont jamais livrés à eux mêmes et le spectateur profite d’une belle direction d’acteurs.  

Marcela Rahal, Giustino
Serse : Natalya BOEVA

➡️ AUGSBOURG 27.IV.2024   Serse de Haendel : tentative baroque mitigée 

                    Comme nombre de théâtres allemands, l’opéra d’Augsbourg possède sa propre troupe de chanteurs lyriques. Dans sa formation, elle s’efforce d’interpréter tous les répertoires. Aussi, les organisateurs ont-ils eu l’idée de monter un spectacle baroque en prenant une œuvre connue de Georg Friedrich Haendel, en l’occurrence Serse. Le choix s’est certainement porté sur cet opéra pour sa partition peu vocalisante (sauf le rôle-titre) au regard des autres opéras du Caro Sassone. Le rôle d’Arsamene par exemple ne présente, à priori, que peu de difficultés. 

Nicholas McGegan (Deborah)
Amanda Forsythe (Deborah)
Samuel Marino (Sarrasine)
Anna Dennis (Il Trionfo del Tempo e del Disinganno)
Sarah Rombergers 9 airs allemands)

➡️ GÖTTINGEN Festival Haendel 13.IV.2024  

Grandiose Deborah 

          Deborah, oeuvre monumentale et très rarement programmée. Aussi, BAROQUENEWS ne pouvait manquer cette occasion unique de s'en faire l’écho. 

Un double événement, avec le retour de Nicholas McGegan dans la ville où il a si longtemps oeuvré en tant que directeur artistique. D'ailleurs, dès son entrée sur scène, le public lui a réservé un accueil des plus enthousiastes. Et le chef le lui a bien rendu car il est loin d'avoir perdu la main. Nous pouvons même dire qu’il a su enflammer l’œuvre par son sens du drame et nous faire vibrer tout au long d'un récit biblique qui se termine par l'exécution du tyran Sisera par la main de Jael. Elle  feint de le recueillir et le cacher chez elle. Pendant son sommeil, elle lui clouera la tête à l’aide d’un pieu et d’un marteau ! Un récit qui n´est pas sans rappeller la Juditha Triumphans de Vivaldi. 

➡️ GÖTTINGEN Festival Haendel 10.V.2024  

Sarrasine : Un spectacle surprise 

          La mystérieuse création Sarrasine a enfin dévoilé ses secrets en ce jour de première au Deutsches Theater de Göttingen. En effet le programme du festival avait laissé plus d’un spectateur perplexe et dubitatif cette année face à une proposition restreinte, a priori moins alléchante pour ne pas dire moins ambitieuse qu’à son habitude, dont ce spectacle Sarrasine. Un pasticcio d’airs pour la plupart inédits (des airs alternatifs, écrits pour des reprises, pour des chanteurs en particulier, etc…) qui aura aiguisé les papilles des passionnés. Et ils n’auront pas été déçus. Certains airs ont fait sensation et les découvrir en live demeure une émotion particulièrement savoureuse. Le choix d’un livret français aura pu rebuter ou du moins intriguer certains.  

GÖTTINGEN Festival Haendel 09.V.2024  

Trionphal Trionfo del Tempo 

          Titre, certes facile mais tellement réaliste : un concert de haut vol par sa distribution mais surtout par sa direction. En effet, George Petrou sait souffler le chaud et le froid comme personne. Un tremblement de terre voire un tsunami semble vous submerger par moments. Les instruments solos sont de toute beauté en plus d’être touchants comme la partie d’orgue exécutée avec jubilation et maestria par Fernando Aguado ou le violon si sensible d’Elizabeth Blumenstock qui a terminé l’oratorio seule, perchée sur un tabouret au bout d’une plateforme devant un parterre de spectateurs en larmes. 

GÖTTINGEN Festival Haendel 17.V.2024  

Les 9 airs allemands : Haendel en toute simplicité 

          Concert sans prétention et un Haendel en toute simplicité. Quatre instrumentistes et le chef claveciniste Olivier Fortin forment l'Ensemble Masques pour porter la voix de la mezzo-soprano Sarah Romberger dans un cadre intimiste, celui de l’église St. Paulus de Göttingen. Une balade bucolique au travers des pièces instrumentales de Telemann et de Bach entrecoupées par le cycle de 9 airs allemands de Georg Friedrich Haendel, appelé 'Neun Deutsche Arien'. 

FEVRIER 2024

➡️ KARLSRUHE Festival Haendel II & III.2024  

➡️ LUXEMBOURG     08.II.2024   Joyaux sacrés de Mozart et Haydn : une flamboyante interprétation sous la houlette du chef William Christie. 

                    Couplage fort intéressant que celui imaginé par les forces combinées du choeur des Arts Florissant et du Luxembourg Philharmonic : les Vêpres solennelles d’un Confesseur de Wolfgang Amadeus Mozart et Les sept paroles du Christ sur la Croix de Joseph Haydn. Deux œuvres sacrées, écrites presque simultanément. La première flamboyante à la gloire du Seigneur. La seconde, douloureuse, nous fait vivre les derniers instants de vie du Christ. Deux œuvres complémentaires mises en miroir ou en tension pour mieux en souligner les différences et accointances stylistiques. 

          En abordant ces œuvres de la période classique, sensiblement proches du baroque, le Luxembourg Philharmonic sort de sa zone de comfort et réalise une interprétation raffinée, spectaculaire et émouvante à la fois sous l’égide du chef William Christie, spécialiste de musique baroque. Une combinaison gagnante, magnifiée par les interventions magistrales du chœur des Arts Florissants. A la puissance jubilatoire du troisième mouvement des Vêpres de Mozart s’oppose la fragilité et la douleur insufflée dans cette passion du Christ et qui ont saisi les spectateurs de la Philharmonie de Luxembourg.

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Julia Wischniewski soprano Mélodie Ruvio alto Bastien Rimondi ténor Matthieu Walendzik basse

JANVIER 2024

Lore Binon, soprano 

Ensemble Lingua Franca 

➡️ NAMUR     18.I.2024   Lore Binon, folies italiennes

          L’ensemble Lingua Franca proposait un florilège de pièces lyriques et instrumentales baroques au Grand Manège de Namur en ce jeudi 18 janvier 2024. Il mettait à l’honneur des compositeurs italiens tels que Vivaldi, Scarlatti, Caldara, Handel, Sammartini ou encore Corelli. Handel n’était pas italien bien entendu mais son passage en Italie et ce qu’il y a composé a été déterminant pour le restant de sa carrière. 

           Contrairement à son titre: ‘Folies italiennes’, le programme ne s'est pas révélé si ‘fou’ que ça (on aurait pu s’attendre à des pieces ou des personnages empreints de démence telle la cantate de Haendel ‘Delirio amoroso’…). Comme le flûtiste et hautboïste Benoît Laurent l’expliquait au public namurois, le programme met plutôt en exergue le style baroque italien et ses changements de rythmes, ses irrégularités, ses passages inattendus. La sonate pour clavecin de Domenico Scarlatti en a été le parfait exemple avec son style ibérique qui relève presque du flamenco : on pouvait entendre les castagnettes dans le jeu fascinant de virtuosité du claveciniste Koneel Bernolet.

          Quatre musiciens accompagnaient la divine soprano Lore Binon et chacun d’eux a pu se distinguer et démontrer son talent : le violoniste Jacek Kurzydlo a su enflammer la Folia de Corelli. Tube baroque absolu, lui et ses complices ont su faire swinguer ses contrastes ainsi que ses rythmes infernaux. Benoît Laurent, quant à lui, a marqué la soirée par chacune de ses interventions. Sa virtuose aisance au hautbois comme à la flûte a bluffé le public, notamment dans la pièce introductive à ce concert : la sonate en la mineur de Giuseppe Sammartini qui nous a fait passer par toutes les émotions : douceur, tendresse, liesse… Quant à Mathilde Wolfs, violoncelliste émérite, son jeu de variations dans l’air de Caldara ‘Pompe inutili’ nous a particulièrement touché. D’ailleurs cet air tiré de l’oratorio ‘Maddalena ai piedi di Cristo’ aura certainement été le highlight de la soirée. Véritable prière, la voix délicate et suave de Lore Binon nous a presque tiré les larmes. D’une manière générale, sa voix uniforme et claire, son timbre charmeur, la clarté du texte et son expressivité ont eu raison des diverses pièces ’amoureuses’ du programme : les élans enflammés et désespérés d’Ergasto dans la très rare cantate de Haendel ‘Languia di bocca lusinghiera’ ou bien les deux airs de Daphné qui tente de résister aux avances lascives du Dieu Apollon. 

Pour clore ce programme du baroque tardif, l’ensemble Lingua Franca a remercié le public de son enthousiasme en lui offrant le divin ‘Domine Deus’ tiré du Gloria de Vivaldi dans une version inédite : une partie de violon en supplément afin que tous soient réunis pour cette dernière pièce. Du pur bonheur.

                                         Ruggero Meli

➡️ PARIS GARNIER        25.I.2024     Un Cesare de bonne facture mais sans passion.

                   Reprise du spectacle de Laurent Pelly au Palais Garnier en ce début d'année. L'opéra Giulio Cesare de Georg Friedrich Haendel, dans lequel le contre-ténor Lawrence Zazzo et la soprano Nathalie Dessay, dans les rôles principaux, s’étaient distingués en 2011. Un spectacle qu'il est d'ailleurs possible de retrouver sur dvd. 

          L’opéra prend place dans les réserves d’un musée, dans lequel, statues et œuvres prennent soudain vie. Un procédé simple mais qui va permettre au spectateur d'être propulsé, d'un seul coup, en l'an 40 avant Jésus Christ et de revivre la fascinante aventure de Cléopâtre et Jules César, affublés de leurs costumes d'époque : toges, armures, boucliers, etc... Les techniciens et ouvriers du musée vont et viennent sur scène en déplaçant statues, toiles de maîtres et autres œuvres d'art. Ils n’ont pas conscience du drame qui se déroule à leur insu et vice versa. On apprécie alors les touches d’humour qui ponctuent tout le spectacle: les statues qui chantent, Cleopatra qui bloque un chariot que les ouvriers ne parviennent plus à pousser sans en comprendre la raison, les traces de doigts ou de mains qui apparaissent soudainement sur des vitrines à peine finies d'être nettoyées ce qui agace des ouvriers perplexes, Cleopatra poussée sur un diable, etc… On s’en amuse et l’on en rit de bon cœur. Le décor impressionne par sa monumentalité (la gigantesque statue couchée de Toutânkhamon sur laquelle Cleopatra fait une entrée magistrale) et le passage à des décors et costumes type XVIIIe siècle au deuxième acte plaît. Certes, la mise en scène imaginée par Laurent Pelly fonctionne plutôt bien, mais passée la moitié de l'opéra, l’ennui nous gagne, lassés de la redondance d’un spectacle qui a du mal à se relancer, à offrir de nouvelles idées et surtout qui manque cruellement de drame théâtral.

          Côté distribution, ...

DECEMBRE 2023

➡️ HEIDELBERG     09.XII.2023   Graun fête la nativité avec le Bachchor

         Les concerts du Bachchor de Heidelberg sont de véritables petits trésors. En effet, chaque année, le théâtre de Heidelberg organise une série de concerts baroques dans le cadre de sa saison. Ils se tiennent généralement à la Peterskirche. Ce sont des concerts d’une grande qualité artistique qui permettent au chœur de Heidelberg de se distinguer dans des œuvres chorales complexes. Souvent dirigés par leur chef Christian Kabitz (cette fois uniquement chef de chœur), ils ont aussi la particularité de mobiliser de talentueux solistes vocaux. 

          Après avoir assisté à Belshazzar, Samson et Jephtha de Haendel, BAROQUENEWS a pu assister à une rareté, ce samedi 9 décembre 2023 : un oratorio de Noël de Carl Heinrich Graun (1704 - 1759) intitulé "Oratorium in festum nativitatis Christi". Une célébration de la naissance du Christ d'une durée d'une heure et trente minutes environ.

         De l'ouverture jusqu'au chœur final, le maestro Jörg Halubek est parvenu à faire de l'œuvre une véritable fête. Deux moments grandioses qui ont fait retentir notamment timbales, trompettes et mis tout un orchestre en effervescence. A noter qu’au centre de l’œuvre nous avons été surpris d’entendre un choral de Bach, tiré de sa Passion selon St Jean, ici interprété par le Bachchor avec une douceur et une ferveur tout en émotion. Saluons également le travail du chef Jörg Halubek auprès de l'excellent Orchestre Philharmonique de Heidelberg.

Enfin, les solistes lyriques réunis pour l'occasion n'ont pas déçu : globalement de bons solistes, dotés de grandes voix. A commencer par la mezzo-soprano, ou plutôt contralto, Zlata Khershberg-Reith, impressionnante de profondeur, de rondeur de timbre et de son généreux. Un chant franc et direct qui manquait peut-être de relief et d'une dose de délicatesse. Des remarques qui pourraient également s'appliquer au baryton-basse Lars Conrad (excellent et impressionnant air 'Abgrund krache') mais aussi au ténor Christian Pohlers dont le timbre était plutôt séduisant mais dont la voix manquait de stabilité. Enfin le contre-ténor sopraniste Philipp Mathmann qui, de sa voix angélique et suraiguë, a conféré une dimension sacrée à l'œuvre,  a créé la surprise en atteignant des notes à la hauteur vertigineuse mais dont le son, trop souvent strident, aura pu irriter une partie du public. On retiendra, notamment, son très joli duo en compagnie de la mezzo-soprano. 

La réussite de la distribution relève, outre les qualités de chacun, du choix de quatre voix extrêmement bien distinctes, qui contrastaient idéalement. 

          Un concert festif et de qualité, salué par un public enthousiaste et nombreux qui a pu découvrir une œuvre rare de Graun qui, une fois n'est pas coutume, nous change du traditionnel Oratorio de Noël de Jean Sébastien Bach.
                                                                          Ruggero Meli 

Bachchor Heidelberg
Jörg Halubek

NOVEMBRE 2023

Ensemble Musica Gloria

➡️ GAND          26.XI.2023 :   Concert champêtre matinal

          Le jeune ensemble Musica Gloria proposait une heure de détente musicale en ce dimanche 26 novembre 2023. Un concert qui invitait le public à une balade pastorale au travers des musiques et airs de Purcell, Haendel, Telemann ou Bach, dans une approche fraîche et enthousiasmante. En effet, les quatre jeunes artistes ont su créer la surprise en favorisant les déplacements et apparitions inattendus. Avec un enthousiasme et une passion palpables, ils ont fait de ce programme un moment de pur bonheur. 

Les airs de Purcell, Haendel et Bach étaient interprétés avec beaucoup de naturel et de simplicité par le contre-ténor Pieter De Praetere. Même si quelques notes extrêmes ont pu faire défaut ça et là, le médium de la voix, rond et plutôt masculin, était bien agréable à écouter. Le point d’extase ayant été atteint à la fin du sublime ‘O solitude’ de Henry Purcell, pris avec une mezza voce de toute beauté. 

Chapeau bas aux trois solistes instrumentaux, la flûtiste et hautboïste Nele Vertommen d’une déconcertante aisance, l’excellent Evan Buttar au violoncelle et viole de gambe et enfin le très virtuose Beniamino Paganini au clavecin. Avec une facilité et un talent hors pair, ce dernier a notamment fait de variations haendéliennes, un véritable feu d'artifice. 

Musica Gloria, un ensemble talentueux à suivre.
                                              Ruggero Meli 

➡️ POTSDAM SANSSOUCI      20.XI.2023 :   Deux contes que tout oppose mais qui finissent par fusionner dans une mise en scène captivante  : WEIR Blond Eckbart et HAENDEL Acis und Galatea

          Une atmosphère pesante, une musique oppressante par ses fortes dissonances qui claquent sous l’effet des cuivres (clarinette et trompette extrêmement sollicitées) mais aussi des percussions. 

Blond Eckbert est un conte fantastique qui relate l’histoire de Berthe, la femme d’Eckbert : suite à une enfance malheureuse et des parents désargentés, elle décide de partir et finit par rencontrer une vieille dame qui possède un chien et un oiseau magique qui délivre des pierres précieuses. Un jour elle décide de s’enfuir et emporte avec elle l’oiseau et les pierres. Prise de culpabilité, elle relâche l’oiseau. Elle et Eckbert racontent l’histoire à un inconnu nommé Walther. Ce dernier, mystérieux voire maléfique, donne le nom du chien alors que Berthe ne s’en souvenait plus ! Le couple est mortifié par cette menace…

La mise en scène de Joe Austin, s’attache à montrer des personnages piégés dans leur vie, leur vécu. Le symbole de l’enfermement, omniprésent, se matérialise notamment au travers d’une boule de verre qui semble recouvrir le monde, de la cage et de l’oiseau prisonnier ainsi que d’une vitrine centrale dont l’espace réduit, au centre de la scène, voit se jouer tout le drame. A l’extérieur de cet espace, le personnage de l’oiseau raconte et commente les événements qui se jouent dans la vitrine: une mise en abîme du théâtre dans le théâtre. Une prison qui se décline à l’infini par le biais de miroirs à l’arrière de la vitrine. De plus, des personnages ailés, qui s’apparentent à des anges ou des religieux, contribuent également à cette atmosphère pesante en venant culpabiliser Eckbart. 

BLOND ECKBERT - Dominik Köninger © Stefan Gloede 

ACIS UND GALATEA © Stefan Gloede 

Ana Maria Labin

➡️ BERLIN        18.XI.2023 :   Mitridate survolté

          Une mise en scène étincelante de dorures dans laquelle le Japon est mis à l’honneur. Une splendeur d’antan, dont les traditions sont rendues avec une élégance, un raffinement et une délicatesse qui côtoient quasi en permanence une violence sous-jacente, presqu’impalpable, qui jamais ne perd son élégance et reste très esthétique tel l’aigle représenté par une série de panneaux, qui, soudain, se met à tournoyer pour fondre sur leur proie. Car le pouvoir et l’amour sont au cœur de ce drame. Un pouvoir convoité dont l’ascension ou la chute sont représentées par deux escaliers latéraux étroits qui renferment en leur centre un immense escalier matérialisé par quatre paliers. 

Un ensemble entièrement pensé au travers de l'imagerie japonaise traditionnelle qui va varier au fil du spectacle. 

➡️ PARIS          17.XI.2023 :   Soirée napolitaine à la salle Gaveau

          Ophélie Gaillard et son ensemble proposaient un programme festif à la salle Gaveau ce vendredi 17 novembre 2023 en partie rôdé précédemment notamment à Ambronay. Les fans de Christophe Dumaux qui y avaient pleuré son absence ont pu se rattraper ce soir. En duo avec l´infatigable et toujours pétillante Sandrine Piau, ils proposaient le tube de Pergolesi : le Stabat Mater. Une interprétation plutôt théâtrale que religieuse que les solistes et l’ensemble Pulcinella ont porté avec ferveur et émotion. Joli cocktail que celui d'une Sandrine Piau toujours fraîche et impeccable et un Christophe Dumaux tout en intensité.

Christophe Dumaux

➡️ PARIS     16.XI.2023 :   Feu d'artifice vocal à l'Auditorium du Louvre

        Belle et grande découverte musicale ce jeudi 16 novembre 2023 à l’Auditorium du Louvre. Une rareté du non moins rare Alessandro Scarlatti : l’opéra Mitridate Eusupatore.

Thibaut Noally et son ensemble Les Accents en avaient donné une version de concert il y a quelques années lors de la 23e édition du festival de Beaune en 2020. Une performance qui avait été captée par France Musique. Pour cette nouvelle occasion, la distribution est montée d’un cran et le public a pu assister à une véritable fête lyrique. Pas moins de cinq voix exceptionnelles pour servir une œuvre qui nous a livré de petites gemmes d’arias. Tous investis et survoltés, ils nous ont fait vibrer au gré de récitatifs éminemment théâtraux et d'arias tantôt virtuoses tantôt élégiaques. Roi, reine, filiation, amour, pouvoir, menaces, intimidations : tous les ingrédients étaient réunis pour faire bouillonner cet opéra baroque.

OCTOBRE 2023

➡️ VIENNE       27.X.2023 :   Theodora sauvée par les décors

         Alors que par définition l’oratorio, en l'occurrence Theodora de Georg Friedrich Haendel, n’est pas destiné à la mise en scène, il semble pourtant inspirer, ou plutôt intéresser, les salles de spectacles et les metteurs en scène (et ce, depuis le coup de maître de Peter Sellars à Glyndebourne en 1996). Une œuvre pourtant pas vraiment simple à valoriser, de part son livret. L'action se déroule à l'époque de la persécution des chrétiens sous Dioclétien. Théodora et Didyme, deux chrétiens chastement aimants, vont tout droit à la mort parce qu'ils ne veulent pas renoncer à leur foi face au tyrannique gouverneur romain Valens.

Après le récent naufrage au Covent Garden de Londres, voilà que le Theater an der Wien propose sa version de Theodora dans un spectacle imaginé par le metteur en scène Stefan Herheim. Dès le lever de rideau, le public tombe en pâmoisons devant le décor luxueux d’un salon de thé viennois. Il s’agit de la réplique bluffante du célèbre Café Central de Vienne avec ses lustres art déco, ses piliers qui soutiennent les somptueuses voûtes d’église, célèbres pour leur panaché de couleurs vives. Le public en prend plein les mirettes. De plus, en arrière plan, au travers de larges vitres, l’on peut distinguer la rue et ses bâtiments protéiformes, ainsi qu’une météo variable, le ciel et ses oiseaux de passage. Un spectacle en soi dont on ne se lassera pas durant 3h (sans l’entracte) et couronné par une surprise de taille, en toute fin de spectacle : le plafond s’affaisse subitement pour laisser paraître un ange aux ailes blanches immenses et dont les mains vont prendre subitement feu. . 

Theodora à Vienne
Aci, Galatea e Polifemo à l"Auditori de Barcelone

➡️ BARCELONE     26.X.2023 :   Brillant Aci, Galatea e Polifemo

          Le talentueux ensemble Vespres d’Arnadi sous la direction du claveciniste virtuose Dani Espasa nous a offert ce jeudi 26 octobre 2023 une version flamboyante de la sublime cantate du jeune Georg Friedrich Haendel : Aci, Galatea e Polifemo. Une œuvre magique par son sujet simple et éminemment émouvant et sa musique qui relève du génie : un concentré d’opera d’une rare perfection d’une durée d’une heure trente environ. Cette naïve pastorale met en scène les amours du berger Aci et de la bergère Galatea. Mais cette dernière est convoitée par le cyclope Polifemo qui finira par commettre l’irréparable en écrasant Aci sous un jet de rocher.   

➡️ ROME      20-21.X.2023 :   Gala des 3 contre-ténors & Giulio Cesare

      Un vent nouveau semble souffler sur l’Italie. En effet, la bella Italia montre des signes d’ouverture, certes encore et toujours timides, à la musique baroque. Les grandes maisons d’opéra programment sporadiquement des œuvres baroques : La Fenice a son cycle Vivaldi, La Scala avait débuté un cycle Haendel, l’an passé l’opéra de Florence accueillait Alcina… Aujourd’hui c’est l’opéra de Rome qui tente l’expérience en programmant le tube de Haendel : Giulio Cesare. Cinq représentations scéniques avec au sein de sa distribution : trois contre-ténors. Une vraie gageure dans un pays où cette voix a été longtemps ignorée pour ne pas dire exécrée. Alors proposer un récital des trois contre-ténors semblait presque relever de la provocation. En tous cas, le public était au rendez-vous et s’est montré enthousiaste. 

Les 3 contre-ténors à Rome: Aryeh Nussbaum Cohen, Raffaele Pe & Carlo Vistoli
Giulio Cesare : Raffaele Pe 
Nardus Williams, soprano

➡️ LONDRES      12.X.2023 :   exquise découverte, la soprano Nardus Williams

          Fabio Biondi et son ensemble Europa Galante, proposaient ce jeudi 12 octobre 2023, dans la salle de concert Milton Court (une annexe du Barbican Center de Londres) un programme consacré aux quatre saisons de Vivaldi, entrecoupé d’airs et de musiques de Henry Purcell et de Georg Friedrich Haendel. 

Fabio Biondi revenait ainsi à ses premières amours. Après les avoir gravées et jouées aux quatre coins du monde, puis 'délaissées', voilà qu'il nous fait la surprise de les reprendre lors de ce concert unique. L'oeuvre semble n'avoir plus aucun secret pour le violoniste italien qui n'a rien perdu de sa fougue ni de son panache. Maîtrisées au cordeau, il en donne une version vibrante et hyper virtuose. Il sait, comme personne, créer les ambiances et suggérer les variations météorologiques tout en révélant les nombreuses subtilités d'une partition intemporelle. Son raffinement n’aura d’égal que sa fougue, auxquels son orchestre répondra avec les mêmes qualités. Ensemble, ils cultivent les contrastes les plus saisissants et font de ces saisons une fête. On ne peut alors que saluer LA performance. 

➡️ PONTOISE FESTIVAL      08.X.2023 :   la soprano Appoline Raï-Westphal, jolie découverte

        Le festival baroque de Pontoise a toujours eu à cœur de valoriser les jeunes artistes soutenus par des artistes confirmés voire prestigieux. C’est le cas en ce concert haendélien lors duquel le public a pu découvrir la jeune soprano Apolline Raï-Westphal en compagnie de quelques membres du fameux ensemble Les Talens Lyriques, dirigés par leur chef et claveciniste Christophe Rousset

          Des artistes que nous avions pu apprécier trois jours plus tôt au festival d’Echternach, devant une salle désespérément vide, alors qu’ils proposaient un programme baroque passionnant autour des figures de Purcell et Haendel en compagnie de l’excellent ténor Ian Bostridge. A Pontoise, le public était nombreux en la cathédrale Saint-Maclou...  

La soprano Appoline Raï-Westphal au festival de Pontoise

➡️ PARIS        02.X.2023 :   William Christie et son équipe donnent un coup de jeune à Ariodante

          Interprétation fraîche et touchante de l'opéra Ariodante de G. F. Haendel, dans une version semi scénique à la philharmonie de Paris ce lundi 2 octobre 2023. Une mise en espace claire et efficace qui favorisait les déplacements autour de l’orchestre et permettait une grande liberté d’expression aux chanteurs, mais avec des pertes de son dommageables pour l’auditeur, selon le placement.

          Léa Desandre incarne un Ariodante enthousiaste, plein de peps, avec ses pas de danse qui font swinguer les vocalises. Des pas de danse repris avec humour par William Christie lui même. Une interprétation vibrante d’émotion 'Scherza infida' et à la virtuosité impressionnante 'Coll’ali di costanza' (dont le da capo a été malheureusement coupé) et surtout l'air 'Dopo notte' en guise de feu d’artifice final.  

Ariodante à la Philharmonie de Paris

SEPTEMBRE 2023

Amadigi de Haendel à Saint Martin-in-the-Fields

LONDRES       21.IX.2023 :   Amadigi enflamme Saint Martin-in-the-Fields

         Mais quelle mouche a piqué cet Amadigi ? Tous les interprètes semblaient avoir bu une même potion énergisante. Des solistes survoltés, habités d’une fiévreuse rage théâtrale et un orchestre déchaîné sous l’impulsion d’un chef que l’on n’attendait pas à la tête des English Consort : Christian Bezuidenhout, lui aussi survitaminé. En effet, le chef titulaire Harry Bicket, dont la direction est généralement plus sage, pour des raisons de calendrier (à cheval entre un pastiche de Henry Purcell et un spectacle d’Acis and Galatea) n’a pas pu prendre en charge cet Amadigi mais était présent dans la salle en tant que spectateur.  

HAMBOURG       14.IX.2023 :   Saul mitigé

          Bilan mitigé pour l'oratorio Saul de Haendel à la Laeiszhalle de Hambourg, tant la performance sonnait amatrice à certains égards. En effet, l'orchestre et le chœur frôlaient l'amateurisme parfois (certainement par manque de répétition) mais deux délicieuses sopranos ont su booster le concert. A elles seules, elles justifiaient, l’importance de cette version de concert en magnifiant la partion du Caro Sassone. Nous connaissions déjà la sémillante Robin Johannsen qui chantait ici le rôle de Merab alors qu’on l’attendait en Michael (le programme de salle indiquait d'ailleurs le contraire). Mais il est vrai que le rôle de Merab, certes plus bas, possède plus de relief et de personnalité que la blanche colombe Michael et recèle un bijou d’air : le très émouvant ‘Author of peace’. De plus, deux autres airs importants lui ont été dévolus : l’air isolé d’entrée souvent chanté par une choriste ‘An infant rais’d’, et surtout le sublime ‘In sweetest Harmony’, absolument déchirant.  

Robin Johannsen
Festival Bayreuth Baroque 2023

BAYREUTH BAROQUE FESTIVAL - weekend n°1      08-10.IX.2023 :   3 récitals et un opéra étincelants !

FÉNÉTRANGE :      Un Stabat Mater de Pergolèse frais et touchant le 16 septembre 2023 à la collégiale Saint Rémi

         Le festival de Fénétrange accueillait, pour sa quarantième édition, une soprano rare et talentueuse : la divine Amel Brahim-Djeloul. Une artiste que BAROQUENEWS a pu apprécier à diverses reprises, notamment dans le rôle d’Oriana dans l’opéra Amadigi de Haendel au Théâtre de l’Athénée à Paris en janvier 2019. A cette occasion, elle avait bénéficié du soutien des forces de l’ensemble Les Paladins et leur chef Jérôme Corréas, des partenaires qu’elle retrouvait lors de ce concert en l’église Saint Rémi.

          Ensemble, ils proposaient un programme court mais intense avec en première partie un motet virtuose du Prete Rosso : ‘In furore’. Une œuvre dans laquelle la soprano a créé la surprise en apportant audace et tempérament conférés au da capo du premier air notamment. 

Voix fraîche, facile et expressive, il est difficile de comprendre le manque de notoriété de cette artiste talentueuse.

Amel Brahim-Djeloul, soprano
Capella Augustina, Andreas Spering
Andreas Wolf, basse

COLOGNE        03.IX.2023 :   Un Acis and Galatea au cordeau.

          Le Forum Alte Musik Köln fêtait, ce dimanche 3 septembre 2023, les 25 ans des concerts du dimanche. Pour cette occasion, ils proposaient le petit bijou de Haendel : Acis and Galatea. Une œuvre resserrée, absolument délicieuse par sa simplicité, son côté bucolique et sa réussite musicale. Le chef Andreas Spering et son orchestre Capella Augustina sont entrés dans ‘l’arène’ comme des lions en interprétant une ouverture foudroyante de part sa rapidité. Rien n’a été laissé au hasard pour ce concert : orchestre et solistes semblaient avoir suivi d’intenses répétitions. Une pratique devenue tellement rare depuis des années de disette où Lyon propose au public, en guise de concert, des répétitions (générales au mieux) par manque de temps et d’argent… Des solistes remontés à bloc donc, avec en tête un Andreas Wolf qui n’a fait qu’une bouchée du rôle du cyclope Polifemo, notamment en faisant véritablement swinger l’air ‘Cease to beauty’.

Charmante Galatea de la soprano Berit Norbakken et vaillant Acis du ténor Hugo Hymas. Excellent Damon de Joshua Ellicott que l’on ne présente plus tant il est sollicité pour les rôles haendeliens (nous le retrouverons très bientôt dans l’oratorio Samson à Stuttgart). Des solistes rejoint par un soutien de qualité, en guise de ripieno comme disent les italiens, le ténor Jonas Boy

A écouter ce dimanche 17 septembre 2023 sur la radio WDR3.

                                                 Ruggero Meli     

Deianira : Miriam Kutrowatz, soprano

COLOGNE        17.VIII.2023 :   Steffani  La Lotta di Ercole

Une rareté à la Philharmonie de Cologne : une oeuvre d'Agostino Steffani, devant une salle désespérément vide. Un compositeur, dont le grand Haendel s´est largement inspiré. D'ailleurs nous avons été frappé par les similitudes de l'ouverture avec celle d'Orlando. Une oeuvre à l'inspiration variable qui a réservé quelques très jolis airs et un divin duo mais qui a suscité un certain ennui aussi. Certainement la faute au placement des solistes, mal audibles, qui chantaient derrière l'orchestre : une initiative peu heureuse. Côté solistes, nous ne retiendrons guère que le lumineux soprano de Miriam Kutrowatz mais aussi le crémeux du contralto de Xavier Sabata.  

COLOGNE        20.VIII.2023 :   Dame Emma Kirkby, des retrouvailles émouvantes.

          Chaque année, le festival Felix de Cologne réserve son lot de surprises. Cet été, un concert tout à fait discret s'est tenu, en matinée, au musée Wallraf-Richartz. Il accueillait la venue exceptionnelle de la Reine du Baroque: la soprano Emma Kirkby. Les fans et les connaisseurs étaient au rendez-vous, portés par une affection toute particulière pour une artiste avec laquelle ils ont le sentiment d'avoir grandi, tout du moins grandi avec ses nombreux enregistrements de musique baroque. Une discographie foisonnante et une artiste qui a eu la chance d’enregistrer à tour de bras à une époque florissante du disque. Nous tous possédons un LP ou un cd que nous chérissons tout particulièrement de la divine Emma Kirkby. Alors, retrouver cette ‘petite’ dame, de 77 ans, en toute simplicité, toute jolie avec sa chevelure frisée au carré, s'est révélé être un moment particulièrement fort en émotion. Certes la voix s’apparente, désormais, davantage au language parlé qu’au chant, mais les airs, soigneusement sélectionnés, s’y prêtaient. Des songs de Haydn et de Purcell à l’atmosphère funèbre que la soprano a su rendre mystérieux et captivants. 

Elle alternait, pour l’occasion, avec la voix quelque peu stridente du contre-ténor Philipp Mattmann qui a su, cependant, trouver l’émotion nécessaire pour rendre justice à des airs tel que ‘Alto Giove’ ou ‘Verdi prati’. 

Après une standing ovation, les deux interprètes ont offert au public le fragile et céleste duo ‘De torrente’ tiré du motet Dixit Dominus de Haendel. Un moment de grâce.

Ils étaient accompagnés par le vaillant ensemble Ārt House 17 sous la direction du fascinant Michael Hell, dont la performance à la flûte dans le concerto de Sammartini nous a totalement bluffé.

                                                    Ruggero Meli

Emma Kirkby
Philipp Mattmann
Sophie Junker, soprano
Ensemble Masques, Olivier Fortin
Semele (Joélle Harvey) and Jove (Stuart Jackson). Photo : Richard Hubert Smith
Semele : Brenda Rae à Munich
Emmanuelle Haïm, cheffe d'orchestre
Cecilia Bartoli chante Rosina ©OMC – Marco Borrelli
Paula Murrihy (Dejanira) © Monika Rittershaus
Paul Antoine Benos-Djian chante le rôle d'Alessandro dans l'opéra Tolomeo de Haendel © Edourd Brane
Ariodante : Emily D'Angelo
Christophe Dumaux & Julie Fuchs
Lawrence Zazzo
Véronique Gens & Ian Bostridge
Federico Fiorio & Diego Fasolis

Stuart Jackson et Elsa Benoit

Karina Gauvin, Alcina

Collegium 1704, Vaclav Luks