Handel JEPHTHA, Bregenz 1.IV.2022

Georg Friedrich HANDEL: JEPHTHA, English oratorio in 3 acts. 

Libretto by Thomas Morell 

BREGENZ LANDESTHEATER 01.IV.2022 7.30pm


Jephtha: MICHAEL FEYFAR, tenor

Iphis: ELISABETH WIMMER, soprano

Hamor: OWEN WILLETTS, countertenor

Storgè: ANNELIE SOPHIE MÜLLER, mezzo-soprano

Zebul: THOMAS STIMMEL, bass-baritone

Angel: VERONIKA VETTER, soprano

Mirjam (Zebul's daughter): MARIA LISA HUBER

Aaron (Zebul's son): NICO RASCHNER


BREGENZER FESTSPIELCHOR

Choir master: BENJAMIN LACK

BREGENZER ORCHESTER

Conductor: HEINZ FERLESCH  

Staging: STEFAN OTTENI

Settings & costumes: AYŞE GÜLSÜM ÖZEL

Lights: ARNDT RÖSSLER

Dramaturgy: MAREN ZIMMERMANN

Conducting assistance: MICHAEL SCHNEIDER

all pictures: Anja Köhler

          A rather interesting production of the oratorio Jephtha by Handel took place in Bregenz this month with a few excellent ideas and a drama going directly to the point. A rather balanced cast under the vivid conducting of Heinz Ferlesch. Yet the real star of the evening was the chorus: impeccable and such a pleasure to listen to. 

          Jephtha, communément connu pour faire partie des chefs-d’œuvre de Haendel, ne suscite bizarrement que très peu d'intérêt de la part des programmateurs de salles. Pourtant l´intensité de son drame se prête idéalement à la représentation scénique (même si par essence l'oeuvre n'a pas été écrite pour la scène) : Jephtha devra sacrifier la première personne qu’il verra à son retour triomphal de la guerre. Seulement c’est sa propre fille qui se présentera à lui. Tous les personnages vont vivre un véritable tourment, refusant l'irrévocable mise à mort.

          Les toutes dernières fois que nous avons pu assister à cet oratorio remontent à janvier 2018 à l’opéra de Paris Garnier (un spectacle sombre et une distribution de haut vol avec notamment une Marie Nicole Lemieux survoltée) puis à février 2018 à Wiesbaden (dans une mise en scène plutôt calamiteuse)

           Au Landestheater de Bregenz le metteur en scène Stefan Otteni a choisi de replacer les événements dans un monde contemporain. Le peuple vénère un mausolée avec ferveur et prie pour la libération d’Israël, un combat que devra mener Jephtha. La mise en scène, fidèle au livret, diffère cependant à plusieurs reprises et suscite l’intérêt tout en révélant quelques subtilités d'interprétations :

          Le spectacle fonctionne plutôt bien et on ne voit pas passer les deux heures sans entracte : le drame a été écourté et resserré (au départ pour des raisons de pandémie puis il a conservé sa durée après son report). Bizarrement les coupures ne se ressentent pas trop (il manque pourtant environ une heure de musique) car le spectateur est totalement happé par les événements. En revanche, on ne peut pas dire que l'esthétique générale laissera un souvenir impérissable. Les décors et les costumes restent peu séduisants mais heureusement quelques jolis moments méritent d'être relevés :

           En bref, une mise en scène plutôt intelligente voire subtile mais qui manque quand même parfois d’idées comme lors de la rencontre inattendue entre Jephtha et sa fille. On aurait aimé une scène un peu plus spectaculaire ou marquante au lieu de cette simple arrivée d’Iphis qui surprend à peine.

          Côté distribution on note une équipe de chanteurs de bonne tenue et plutôt équilibrée dont on retiendra surtout l’excellente performance de Owen Willetts, et son timbre chaud, sombre et généreux qui fait des merveilles dans le rôle d’Hamor ainsi que la touchante Annelie Sophie Müller, dont le beau mezzo rend justice à une partition tourmentée dans le rôle de Storge.

Le reste de la distribution ne démérite pas pour autant: 

          Le ténor Michael Feyfar dans le rôle titre, qui après un petit temps de chauffe (quelques duretés dans la voix et un air "Virtue my soul" aux notes aiguës tendues mais à l´admirable vocalise sans reprise de souffle) trouve un bel équilibre entre baryton et ténor ainsi qu´entre puissance dramatique et la prière d´un "Waft her angels" sensible et léger.

          La soprano Elisabeth Wimmer dans le rôle d’Iphis, affiche un timbre qui n'est pas toujours très pur mais qui sait procurer de l’émotion notamment dans le déchirant « Farewell ».

           Thomas Stimmel offre à Zebul son imposante présence scénique. Dommage que le rôle soit si court car sa tessiture de baryton-basse tel un roc impressionne, bien qu'on ait parfois un peu de mal à l´entendre.

          La voix de la soprano Veronika Vetter dans le rôle de l’ange était cohérente avec son personnage: une voix certes angélique mais non dépourvue de personnalité. Elle s'impose facilement avec son seul air "Happy, Iphis".

          Signalons que le quatuor "Oh, spare your daughter" était particulièrement bien réussi. Un quatuor qui semble même s'être transformé en quintette avec la participation vocale du récitant Nico Raschner.

          Reste deux protagonistes de premier plan : l´orchestre et le chœur.

          Le chef d'orchestre Heinz Ferlesch dirige avec passion, dynamisme (un "Up the dread steep ascending" tonique) et précision un orchestre sur instruments modernes qui a su se plier aux exigences du jeu baroque. Le son est généreux et séduisant dès les premières notes de l´ouverture. Seul bémol, une tendance à jouer trop fort au point parfois de couvrir les voix. On aurait par exemple aimé un son murmuré dans un air tel que "Waft her angels".

          Saluons enfin les remarquables interventions du Bregenzer Festspielchor extrêmement bien préparé qui a fait un travail admirable sur une partition qui pourtant ne le ménage pas et multiplie les difficultés (les vocalises en fugue sont nombreuses et redoutables). Il a su rester tout du long : propre, clair et pas du tout tonitruant comme on peut l´entendre parfois.

          In fine, un spectacle qui ne laissera pas forcément un souvenir impérissable (costumes et décors un peu chiches) mais qui a su tenir le public en haleine en allant directement au chœur du drame, et en faisant émerger des idées plutôt intéressantes voire intelligentes.

          A noter que de nombreuses interventions de récitants sont venues émailler le déroulement de l'oratorio. Des interventions en langue allemande qui nous ont totalement échappées.