BACH St John Passion - Mersch 21.III.2021

          Difficile de ne pas transposer ce monument de douleurs qu'est la Passion selon St Jean de BACH à la situation de pandémie mondiale à laquelle nous sommes confrontés depuis plus d'un an maintenant, témoins d'une hécatombe sans précédent. Jamais cette Passion selon St Jean n'aura raisonné avec autant de force émotionnelle, tel un Requiem qui panserait les plaies des âmes affligées que nous sommes mais tellement heureuses de renouer avec la musique live. Chapeau aux organisateurs d'avoir pu maintenir ces deux concerts (samedi 20 et dimanche 21 mars), dans des conditions de distanciations drastiques pour un public limité à 100 personnes et des chanteurs soumis à des tests journaliers. D'ailleurs le concert a été mis en attente des résultats des tests. 

           Le point fort de cette Passion aura été sans conteste les grandes qualités d'une distribution quasi sans faille. L'honneur revenant à un Évangéliste, Eric STOKLOSSA, d'une sensibilité à fleur de peau, avec sa mezza-voce d'une fragile douceur, mais d'un aplomb et d'une force de persuasion qui n'ont laissé place à aucun moment d'ennui. Le public prend alors un plaisir immense à suivre un texte expressif et tellement vivant. 

          La soprano Myriam ARBOUZ, que BAROQUENEWS avait suivie lors du Concours de Chant Baroque de Froville il y a quelques années et qui l'avait consacrée grande gagnante, a marqué les esprits à chacune de ses interventions. Sa fraîcheur et sa simplicité ont rivalisé avec un chant confondant de facilité et une admirable technique mise au service de l'émotion allant jusqu'aux frissons voire les larmes (Zerfliesse, mein Herze).

          La mezzo-soprano Franziska GOTTWALD, appelée à la rescousse deux jours avant, est LA spécialiste de BACH. BAROQUENEWS l'a souvent suivie avec bonheur, notamment dans Vivaldi L'Oracolo di Messenia à Caen, Alcina à Cologne, etc... Sa simplicité et son naturel presque déconcertants, n'ont eu d'égal qu'un chant noble et touchant le tout délivré par un timbre chaud et des couleurs marbrées. Elle suscite admiration et respect. 

          Quant à Jésus, interprété par Wolf Matthias FRIEDRICH, là encore le personnage prend vie sous une dimension humaine à la fois fragile et touchante mais d'une percutante force expressive. On reste fasciné par tant de prestance et de projection vocale. 

          Toutes les interventions du baryton Antonio DI MARTINO, dans le rôle de Pilate, ont été remarquables. 

          Le seul bémol de cette distribution de haute volée aura certainement été le timbre quelque peu nasal et si particulier mais à la technique solide du ténor Alexander GEBHARD. Il apporte pourtant une couleur et une tessiture qui lui permettent de se distinguer fortement de l'autre ténor de la soirée. 

          Ajoutons, que les interventions des instruments solistes étaient  fort appréciables, alors même que la direction de l'orchestre et du chœur auraient pu gagner en dynamisme et précision pour le premier, en clarté pour le second. Cela dit, le public, privilégié d'avoir pu bénéficier du précieux sésame, n'a pas boudé son plaisir et offert une standing ovation méritée après une Passion qui a su conjuguer toute la piété de l’œuvre à sa théâtralité. 

          Notons que la distribution initialement annoncée comportait la soprano Gerlinde SÄMANN, et le contre-ténor Alex POTTER, contraints de déclarer forfait car cas contact nous a-t-on dit.