Anvers, DeSingel le vendredi 21 février 2025 à 20h
Henry Purcell : The Indian Queen, Z630
Doña Louisa / Teculihuatzin : Jeanine De Bique, soprano
Doña Isabel : Natalya Smirnova, soprano
Hunahpú : Dennis Orellana, contre-ténor
Ixbalanque : Andrey Nemzer, contre-ténor
Don Pedrarias Dávila : Mingjie Lei, tenor
Don Pedro De Alvarado : Kirill Nifontov, ténor
Maya-Schamane : Nicholas Newton, baryton-basse
voix : Amira Casar
Utopia Choir & Orchestra
Teodor Currentzis, direction
Les passionnés savent combien les concerts dirigés par Teodor Currentzis sont de petits bijoux voire de petits miracles. D’ailleurs ce spectacle affichait quasi complet à la minute de sa mise en vente. Et cette reprise du spectacle madrilène de Peter Sellars n’a pas dérogé à la règle. Avec son look rock n’roll (tout de noir vêtu: jeans moulants, bottines et T-shirt sans manches), le chef dirige sans baguette mais paraît avoir une baguette magique car tout ce qu’il touche semble se transformer en or. Tout ennui est exclu, la musique surgit tantôt des tréfonds ou se met en apesanteur, on vibre avec l’orchestre et l’on reste subjugué par les contrastes marqués, les atmosphères diverses qui confinent même en une expérience spirituelle bouleversante.
Depuis sa création à Madrid, le spectacle est monté en puissance, notamment avec la présence de la soprano Jeanine De Bique, qui fait montre d’une ineffable sensibilité. A lui seul, l’air ‘They say’ du début du concert puis repris à la fin vaut d’avoir eu la chance d’assister à ce concert. Murmurée et au bord de la rupture, cette prière a mis le public à genoux. Malheureusement, quelques gorges enflammées ont eu tendance à ruiner le déroulement fragile de ce concert. Une interprétation qui ne supporte pas les nuisances sonores. Effectivement, on ne peut reprocher au public de tousser, c’est arrivé à chacun de nous, mais il est si facile de tousser dans sa manche ou dans un mouchoir pour étouffer le son…
Mention spéciale au chœur Utopia qui nous a réservé de divins moments pétris d’émotions.
Nous retiendrons aussi les interventions marquantes du baryton-basse Nicholas Newton, impressionnant lorsqu’il s’est mis à projeter sa voix de roc, et surtout la sensibilité du contre-ténor Andrey Nemzer qui nous a tellement touché dans son air 'Music for a while', tout comme le ténor Mingjie Lei si délicat et sensible dans chacune de ses interventions. Quant au contre-ténor Dennis Orellana, il a su s’imposer avec brillance. Seuls les chanteurs Kirill Nifontov, tout juste acceptable dans le peu qu’il avait à chanter, et la soprano Natalya Smirnova, dont la voix nous a semblé encore un peu verte, ne nous ont pas complètement convaincus.
A noter également l’aspect théâtral dont surjoue le chef Teodor Currentzis qui pourrait bien agacer une partie du public. A lui seul, c’est un show total auquel on assiste au point que son omniprésence et sa gestuelle envahissante jusque sous les narines des chanteurs peut agacer.
Mais quel résultat tout de même et le public a réagi en se levant d’un seul homme à la fin d’un spectacle de près de quatre heures. On en redemande.
Ruggero Meli