Handel TAMERLANO, Francfort 5.XII.2022
Bockenheimer Depot, Monday 05 December 2022, 7.30pm
Dramma per musica in drei Akten / UA 1724
Text von Nicola Francesco Haym nach Libretti von Agostino Piovene und Ippolito Zanelli basierend auf Jacques Pradon.
In italienischer Sprache mit deutschen Übertiteln
Tamerlano: Lawrence Zazzo
Bajazet: Yves Saelens
Asteria: Elizabeth Reiter
Andronico: Brennan Hall
Irene: Cecelia Hall
Leone: Jarrett Porter
Frankfurter Opern- und Museumsorchester
Musikalische Leitung: Karsten Januschke
Inszenierung: R.B. Schlather
Bühnenbild: Paul Steinberg
Kostüme: Doey Lüthi
Licht: Marcel Heyde
Dramaturgie: Mareike Wink
The opera starts before the beginning with an unexpected and disturbing staging which keeps questioning the audience shown into the heart of an American prison (the orchestra is kept in an iron cage) in which each singer embodies a typical character of the American culture (a cowboy, a cheerleader, a football player, etc...). This scenario may have lead to boredom if the cast hadn't been sostrong, especially thanks to the American couter-tenor Lawrence Zazzo in the role of Tamerlano who made an amazing and memorable show!
Drôle de Tamerlano que celui-la ! Déroutant au possible ! Tout semble avoir été fait pour brouiller nos habitudes et pour nous déstabiliser. Le spectacle démarre, alors qu'on ne s'y attend pas. Un cowboy parade sur scène et fait entrer l'orchestre pour l'enfermer dans une cage (le contre-ténor Lawrence Zazzo méconnaissable) ! L'ouverture surprend par son exécution fiévreuse. Les premiers récitatifs ne sont pas chantés mais parlés. Les personnages sont affublés de vêtements modernes rehaussés de numéros, ils vont et viennent parmi le public, etc...
Le spectacle nous plonge au cœur d'une prison américaine, type Guantanamo, tandis que chacun des personnages incarne une figure forte de la culture américaine: Tamerlano n'est autre qu'un cowboy, un brin ringard et sadique, Andronico un joueur de football américain, Irene une pom-pom girl, Bajazet un condamné à mort à la combinaison orange, Asteria une jeune rebelle des banlieues... On s'en amuse, on ne s'ennuie pas le moins du monde, mais les premières surprises passées, le spectacle ne semble plus vraiment avancer ni se renouveler et cette transposition finit par nous laisser quelque peu perplexe.
Côté solistes, le rôle-titre est admirablement joué et chanté par un Lawrence Zazzo volcanique, provocant, faisant le show de bout en bout notamment dans son air "Vo dar pace" dans lequel il manie le lasso et les effets vocaux comme personne. Ce contre-ténor ne cesse de nous surprendre par sa progression qui semble désormais sans limite et toujours plus bluffante. Il faut pourtant apporter un bémol à tout cela car le redoutable air « A dispetto » a mis l’interprète en sérieuse difficulté, contraint d'alléger considérablement le volume de sa voix pour réaliser un semblant de virtuosité. Nous avions déjà assisté à ce spectacle il y a 3 ans et cet air nous avait déjà semblé problématique mais pas à ce point.
Son rival Bajazet, incarné par le ténor Yves Saelens, peu habitué à ce répertoire, s’acquitte de sa partie, certes honnêtement mais sans briller. Alors qu’il y a 3 ans ce choix paraissait plutôt convenable, la voix nous a semblé cette fois moins souple voire poussive parfois. On retiendra tout de même une certaine aisance à naviguer entre le ténor et le baryton ainsi que la scène de sa mort qui aura fait frissonner plus d’un spectateur. La simplicité de son "Figlia mia" nous a touché, et son sens du drame dans les récitatifs accompagnés a conféré force et consistance à son personnage.
Alors que le contre-ténor Brennan Hall s’était particulièrement montré décevant et faible dans le rôle d’Andronico il y a trois ans, il a été confié cette fois à l’excellent Dmitry Egorov, dont la voix ronde, fruitée et uniforme fait des merveilles. Nous tenons là l’un des meilleurs contre-ténors actuels et injustement méconnu (son Radamisto notamment nous avait ébloui). À noter également une sensibilité et une émotion tout en simplicité mises au service d’airs tels que "Cerco in vano" ou "Benche mi sprezzi". Quel cruauté, en revanche, de lui avoir ravi son air virtuose "Piu d'una tigre", connaissant ses moyens.
Quant à la soprano Elizabeth Reiter, c’est une aubaine de l’avoir distribuée dans le rôle d’Asteria. Ses moyens vocaux dépassent le rôle. Rarement a t-on entendu pareille Asteria. Son implication et son sens du drame propulsent le personnage vers celui d’une grande tragédienne. Impressionnante, elle marque le rôle au fer rouge.
La mezzo-soprano Cecelia Hall, souffrante il y a trois ans, a enfin pu montrer toutes ses qualités dans le rôle d’Irene, l’amante de Tamerlano délaissée. Elle parvient à se distinguer même si ce petit rôle n’est pas vraiment valorisant.
Enfin le baryton Jarrett Porter donne plutôt satisfaction dans le rôle court de Leone. Liviu Holender, il y a trois ans, se sortait mieux des vocalises du redoutable « Nel mondo e nell’abisso ».
Le spectacle fait abstraction de la fin de la partition, et se concentre sur la mort de Bajazet directement suivi par un chœur final plein de douleur et quasi murmuré tandis que l'orchestre cesse de jouer avant la fin, laissant les voix s’eteindre ! Du plus bel effet !