Handel ALCINA Hamburg 28.II.2020

HAMBURG: Handel Alcina

Staatsoper, Friday February 28th 18H30 

Philharmonisches Staatsorchester Hamburg

Dir. Christopher Moulds

Director: Christof Loy

Set and Costume Designer: Herbert Murauer

Choreography: Beate Vollack

Lighting Designer: Reinhard Traub

Premiere: 24.02.2002 

© Hans Jörg Michel
© Hans Jörg Michel
© Hans Jörg Michel
© Hans Jörg Michel

A production with few actions, mainly revealing the characters' psychology in a rather sublte way. Once again (after 2 reprises) the cast proves to have been well chosen, especially soprano Julia Lezhneva with her tender and moving singing in the role of Morgana: pure delight !

          Reprise de la reprise de la production de Christof Loy de 2002 avec à l'origine Véronique Gens dans le rôle d'Alcina et une « survivante » Maite Beaumont qui chantait et chante de nouveau en cette soirée du vendredi 28 février 2020 (18 ans après donc) le rôle, qui lui va si bien, de Ruggiero. 

          Une production aux décors quelque peu avares : une grande toile dans l'Acte I représentant une scène champêtre supposée être l'île d'Alcina enfermée dans une maison dont on voit les portes de part et d'autre de la scène. L'Acte II fait place à une salle, au papier peint défraîchi, qui ressemble à celle d'un musée d'histoire naturelle avec des cabinets renfermant les trophées d'Alcina, des hommes qu'elle aurait transformé en animaux ou en objets divers. Enfin l'Acte III a fait voler en éclat la paroi du fond pour laisser place à un espace ouvert (la liberté) dans une brume vaporeuse. Ce spectacle ne favorise que très peu les actions sur scène, il s'attache surtout à mettre subtilement en lumière les sentiments, les émotions et la psychologie des personnages comme dans l'air de Ruggiero « Di te mi rido », des mots qui semblent se retourner contre lui-même, il se rit des reproches de Bradamante e Melisso à propos de sa fidélité, mais finit par être en proie aux doutes à propos de celle d'Alcina qui ne semble plus vouloir reparaître. Ou encore l'air du ténor « Semplicetto, a donna credi », des mots qui là encore semblent se retourner contre lui-même, il se moque de la naïveté de Ruggiero mais se rend vite compte qu'il est le dindon de la farce, trahi par sa bien aimée Morgana, etc... Une mise-en-scène qui oppose réalité et fiction, contemporain et ancien: les personnages modernes (costumes contemporains) s'opposent aux personnages "anciens" (costumes XVIII° siècle). A noter que les ballets, très souvent coupés, ont été conservés, et viennent quelque peu égayer le spectacle en donnant l'opportunité d'apprécier le travail soigné et moderne des danseurs de l'opéra de Hambourg en costumes XVIII° siècle, un mélange plutôt réussi. Bref, de bonnes idées et un spectacle qui se laisse apprécier, mais qui n'enthousiasme pas non plus, dû notamment au manque d'actions. 

          Comme à chaque reprise, la distribution réunissait, une équipe de chanteurs de grande qualité. A commencer par le Ruggiero de Maite Beaumont, qui a dû particulièrement plaire aux personnes n'appréciant pas vraiment les contre-ténors comme Franco Fagioli, qui pourtant avait été excellent la saison dernière en place et lieu. L'intensité et l'engagement de la mezzo-soprano espagnole sont restés intacts depuis 2002 voire se sont intensifiés et même bonifiés. Elle possède ce petit plus qui mêle fierté et profondeur à la manière de la zarzuela ou encore du « flamanco espagnol » qui confère une intensité particulière et un sacré panache à son personnage comme dans l'air « Sta nell'Ircana » (accompagné d'une amusante chorégraphie) ou bien encore une désespérance à vous crever le cœur comme dans l'air « Mi lusinga ». 

           Layla Claire qui prête sa voix au personnage principal Alcina, possède toutes les qualités nécessaires au rôle, qu'elle connaît bien pour l'avoir interprété au festival Haendel de Karlsruhe deux années de suite. La voix est longue et claire et donne l'avantage de pouvoir apprécier pleinement et distinctement toutes les notes du rôle, le timbre est sans conteste agréable, la technique excellente, avec un physique de rêve: élancée et naturellement élégante, mais voilà, elle peine à émouvoir, manque d'expressivité au point de paraître un brin froide voire un brin ennuyeuse. De plus, en cette soirée du 28 février 2020 à Hambourg, certaines notes aiguës sonnaient bien tendues, comme si la chanteuse éprouvait des difficultés à les émettre, elle affichait une meilleure forme à Karlsruhe. A signaler qu'elle remplaçait Hulkar Sabirova, initialement prévue. 

          Comme à son habitude, belle prestation de la part de Katarina Bradic en Bradamante. Il est dommage que l'on n'entende pas plus souvent cette artiste. Mais c'est Julia Lezhneva (qui avait déjà repris le rôle la saison dernière) en Morgana et sœur d'Alcina qui a le plus suscité l'admiration en donnant un éclairage nouveau à ce personnage très souvent entendu à l'aide de notes stratosphériques. Ici grâce à une voix plus centrale, pleine et ronde elle donne à entendre une Morgana touchante, moins brillante mais plus profonde, pleine de charme et de sensibilité avec notamment des vocalises et des trilles à vous damner, sans parler du touchant "Ama sospira" ou de l'air "Credete al mio dolore" à vous tirer les larmes. Avec les années, elle a notamment corrigé des notes aiguës tendues et parfois désagréables en les allégeant et en leur conférant une divine délicatesse. 

          Fabio Trümpy, que l'on avait déjà entendu à Zurich et qui n'avait pas convaincu, nous a fait très bonne impression cette fois, incarnant un Oronte très expressif et un engagé. Dommage qu'on lui ait coupé son air du second Acte. 

          La petite Narea Son nous a offert un Oberto tout à fait intéressant et crédible dans ce rôle de petit garçon à la recherche de son père notamment dans son second air dans lequel elle a véritablement brillé grâce à un da capo des plus divins, notes piquées et cadence virevoltante. Enfin Nikolay Borchev a donné satisfaction dans le petit rôle de Melisso. 

          Christopher Moulds, spécialiste de cette musique, à la tête du Philharmonisches Staatsorchester Hamburg, a fait un travail remarquable, attentif, précis et toujours souriant à l'égard des membres de cet orchestre.

24.II.2002 (première)

Alcina: Véronique Gens

Ruggiero: Maite Beaumont

Bradamante: Antigone Papoulkas

Morgana: Gabriele Rossmanith

Oberto: Sabine Ritterbusch

Oronte: Christoph Genz

Melisso: Jörn Schümann 

2018

Alcina: Agneta Eichenholz

Ruggiero: Franco Fagioli 

Bradamante: Sonia Prina

Morgana: Julia Lezhneva 

Oberto: Narea Son

Oronte: Ziad Nehme

Melisso: Alin Anca 

28.II.2020

Alcina: Layla Claire

Ruggiero: Maite Beaumont

Bradamante: Katarina Bradić

Morgana: Julia Lezhneva

Oberto: Narea Son

Oronte: Fabio Trümpy

Melisso: Nikolay Borchev