2024 Comptes rendus
NOVEMBRE 2024
➡️ FRANCFORT 16.XI.2024 Haendel Partenope
Un petit grain de folie s'est emparé de l'opéra Partenope
Un spectacle sciemment déstabilisant, bouillonnant, qui d’emblée part dans tous les sens, détonne et surprend. Des danseurs semi-nus occupent l’espace et font le show. Les costumes, sans cohérence, vont du guerrier grec à l'élégance XVIIIe siècle. Un imbroglio pensé comme une douce folie visuelle par les soins de la jeune metteuse en scène Julia Burbach. Les personnages prennent tout à la légère et plongent le spectateur dans une atmosphère légère et divertissante à la Goldoni. Ils évoluent au cœur d’un manège : une scène circulaire en mouvement surmontée d’un panneau en demi-cercle en guise de mur de fond de scène. Un rideau, fait de longues lamelles légèrement transparentes, coulisse de temps à autre jusqu'à recouvrir la scène, permettant ainsi diverses entrées et sorties. Un jeu de rêverie et de réalité opère alors. il donne l’impression que tout n’est que fête et légèreté à l’intérieur et réalité à l’extérieur. Un effet qui se renforcera durant la seconde partie comme si ce monde enchanteur prenait petit à petit un caractère de plus en plus sérieux et de moins en moins léger. Les sentiments des personnages se renforcent et l’on est subitement touché par leur sincérité. Ceci dit, la trame de l'opéra reste bien opaque si l’on n’est pas en capacité de lire les surtitres en allemand. Il faut dire qu’il est difficile de traiter un livret quasi indigent qui se résume à un imbroglio amoureux alambiqué : Partenope est amoureuse d’Arsace qui l’est en retour mais aime aussi Rosmira et ne sait laquelle choisir. Partenope est également courtisée par Armindo qu’elle finira par épouser…
➡️ MADRID 15.XI.2024 Haendel Theodora
Entre fascination et dégoût
Les productions de Theodora se succèdent et s’ajoutent à la collection des déceptions. Pas moins de 5 DVDs pour l’œuvre la plus empreinte de piété de Georg Friedrich Haendel et aucune n’arrive à la cheville de la mythique production de Glyndebourne mise en scène par les soins du génial Peter Sellars. Un spectacle qui avait notamment révélé le contre-ténor David Daniels. Et cette coproduction entre Madrid et Londres, imaginée par Kathie Mitchell n’arrange rien : une transposition contemporaine qui se déroule vraisemblablement à l’ambassade de Rome avec un Valens corrompu par l’argent, 'consommateur' abusif de femmes (prostituées), et exécrable avec son personnel surtout féminin. Le combat religieux défendu par le livret semble complètement anéanti, remplacé par le combat féministe. Theodora et Irene se rebiffent et seront sévèrement punies pour avoir fomenté un attentat à la bombe. Pire que la mort, Theodora qui travaille en cuisine, sera condamnée à la prostitution. Même si l’on reste perplexe par le concept, le point fort de cette mise en scène réside dans son traitement cinématographique. On a l’impression de visionner un film policier, les bons et les méchants se confrontent à coup d’armes à feu. L’impressionnante enfilade de pièces (on passe des cuisines, au salon, à la salle des plaisirs, à la chambre, puis en chambre froide) défilent à l’horizontale comme une pellicule cinématographique que l’on déroulerait et scruterait à la loupe. Deux scènes font l'objet d'un traitement particulièrement et sciemment provoquant voire choquant : celle où Theodora chante son sublime air intimiste 'With Darkness deep' dans cette pièce capitonnée rouge dédiée à la luxure, accompagnée de deux prostituées s’adonnant à des figures de pole dance. Et celle dans la chambre froide, dans laquelle Theodora et Didymus sont traités comme ces carcasses de cochons accrochées pour consommation ultérieure. On est alors partagé par l'intention louable voire fascinante de Katie Mitchell à montrer une réalité forte et prégnante et le résultat quelque peu dégradant. En effet, les deux moments les plus sublimes de la partition s'écoutent dans un cadre repoussant voire écœurant.
➡️ LAUSANNE 08.XI.2024 Haendel Alexander's Feast
Une splendeur !
Une œuvre rare qui coule pourtant dans les veines du Concentus Musicus Wien depuis quasiment ses débuts sous la direction du très regretté Nikolaus Harnoncourt. Pas moins de deux enregistrements cd à leur actif (l'un date de 1977, l'autre de 2012). Les aficionados ne manqueront pas de se procurer la diffusion télévisée du concert de 2012.
Au même titre que certaines cantates (en réalité de mini opéras) telle que Aci, Galatea e Polifemo sont de véritables bijoux, Alexander’s Feast, chef d’œuvre haendélien absolu, relève du mini oratorio. À croire que cette forme réussissait particulièrement au Caro Sassone. On pense par exemple à Esther.
Le festin d’Alexandre n’est autre qu’une Ode à la Ste Cécile, patronne des musiciens. Il met en scène Alexandre Le Grand et sa maîtresse Thaïs dans la cité de Persepolis où ils ont organisé un banquet. Ils ont convié, pour l'occasion, le musicien Thimotheus pour les divertir. Celui-ci éveille chez ses convives différentes émotions clairement reproduites par la rhétorique baroque.
➡️ STRASBOURG 6.XI.2024 Haendel Ariodante
Transposition contemporaine plaisante mais loin d’être captivante
Un spectacle qui débute par un flash-back (hors livret) imaginé par la metteuse en scène Jetske Mijnssen. Le spectateur se retrouve quelque 15 ans avant le début de l’opéra de Haendel, au cœur d’une maison cossue, dans un salon tout à la fois classieux et sobre, couleur bleue pastel. On assiste alors à des jeux d’enfants : la petite Ginevra, parée d’une robe de mariée, défile fièrement au bras de son amoureux Ariodante. Mais leur "union" suscite la jalousie de Polinesso ainsi que celle de Dalinda. Et les jeunes garçons finissent par se défier à l’épée. Devenus adultes, Dalinda et Polinesso semblent avoir une revanche à prendre. Une transposition dans les années 1960s qui fait la part belle aux costumes et aux coiffes de cette époque. Le roi d’Ecosse n’est ici qu’un vieux monsieur grabataire à l’autorité incontestable, il est en permanence suivi d’un infirmier, Lurcanio. La transposition posée, nous assistons alors aux préparatifs de mariage : les domestiques s’affairent pour que tout soit au cordeau.
Dans la deuxième partie, la pièce principale sera rétrécie et laissera paraître une multitude d’autres pièces et de portes, le tout présenté astucieusement. Un clin d’œil avec ce qui se pratiquait à l’époque du Caro Sassone : les châssis alignés latéralement pour créer une perspective infinie.
Nous tenons là les deux bonnes idées de cette mise en scène : avoir su montrer les origines du problème dans la première partie et avoir présenté des décors à l’inspiration baroque dans la seconde.
Insuffisant pour rendre ce spectacle passionnant car le déroulé reste avare d’actions intéressantes : Ginevra chante son air en arrangeant des fleurs dans des vases, Ariodante chante son air de bravoure en serrant fort la robe de sa Ginevra sur sa poitrine, le roi chante ses vocalises au rythme de ses spasmes, etc… D’aucuns pourront trouver le temps long et le spectacle bien terne.
OCTOBRE 2024
➡️ LONDRES 29.X.2024 Haendel Aci, Galatea e Polifemo
Incandescente interprétation
La mythique salle du Wigmore Hall de Londres accueillait en ce mardi 29 octobre 2024 l’ensemble britannique (qui porte un nom italien) La Nuova Musica et son fougueux chef David Bates pour nous offrir un bijou de jeunesse de Haendel : Aci, Galatea e Polifemo. Une sérénade ou pastorale d’une durée d’1h30 environ qui met en scène les amours du berger Acis et de la nymphe Galatée, convoitée par le cyclope Polyphème. Ce dernier finira par éliminer son rival d’un jet de rocher. Galatée, brisée par la douleur, transformera son Acis en un ruisseau.
Le fait que le berger Acis soit chanté par une soprano et Galatea par une contralto pouvait être source de confusion pour le spectateur non averti.
Version incandescente que nous offraient des interprètes mus par une rageuse interprétation.
Lucy Crowe, vibrant Acis, fait des merveilles dans les da capo avec un festival de notes hautes et piquées. Son ‘Qui l’augel’ accompagné du hautbois puis de la flûte a déclenché une salve d’applaudissements méritée. Fleur Barron nous a gratifiés de son timbre particulièrement sombre et capiteux. Une très heureuse découverte ! Enfin Luigi De Donato, Polyphème incomparable, un habitué du rôle, a fait sensation en bravant avec brio les difficultés vocales d’une partition quasi inhumaine.
L’œuvre s’est étonnamment achevée sur le récitatif d’un Polyphème bien méditatif, le chef faisant fi du chœur final festif que Haendel a prévu. Une façon de renforcer la fibre dramatique de l’oeuvre. Le chœur final sera donné en bis.
Ruggero Meli
➡️ ANVERS 25.X.2024 Gluck Iphigénie en Tauride
Une réussite si ce n'est la mise en scène !
Transposition contemporaine du drame mythologique grec avec des moyens qui semblent d’emblée bien limités. Quelques marches en guise de sièges d’une salle de théâtre. Le public affublé de vêtements de ville assiste à la représentation théâtrale (en néerlandais) d’une tragédie grecque mettant en scène Agamemnon et une Clytemnestre particulièrement révulsée. Une scène rageuse, conflictuelle, à laquelle assiste leurs enfants traumatisés. C’est la fin du spectacle et le public applaudit avec ferveur lorsque soudain une violente explosion retentit. Le plafond s’écroule, la foule en panique et ensanglantée tente de fuir, mais les assaillants font irruption, massacrent et nous assistons même à deux viols perpétrés par Thoas.
C’est la guerre (certainement une référence au début du conflit russo-ukrainien, lorsqu’une bombe russe était tombée sur le théâtre Marioupol). Même si le lien reste bien ténu entre le drame d’Iphigénie et la guerre russo-ukrainienne, nous supposons que ce sont ces atrocités qui éveillent les souvenirs traumatiques d’Iphigénie. On imagine aussi que les ‘terroristes’ veulent la contraindre à exécuter Oreste ou Pylade sans qu’elle sache que l’un d’entre eux n’est autre que son frère.
➡️ BÂLE 18-20.X.2024 L'ensemble La Cetra fête ses 25 ans.
Des concerts flamboyants
Pour fêter dignement ses 25 ans d’existence, l’ensemble de musique baroque de Bâle La Cetra a concocté pour son public, un week-end de trois jours de concerts festifs du vendredi 18 au dimanche 20 octobre 2024.
Le premier concert mettait à l’honneur les qualités exceptionnelles de l’ensemble La Cetra sous la direction incandescente du chef Andrea Marcon avec des invités qui ont contribué à son rayonnement international.
Bien entendu, le programme faisait la part belle aux compositeurs qui ont fait la renommée de l’ensemble : Vivaldi, Haendel et pour commencer Bach...
➡️ ZURICH 17.X.2024
Serse complètement psychédélique
Deux blocs d'appartements qui se meuvent au gré des pièces occupées. L'un cossu, habité par le très élégant et fortuné Serse, l'autre plus chaotique, occupé par son frère et rival Arsamene, au look rock n'roll 'destroy', qui vit apparemment en cohabitation avec des acolytes plus extravagants encore. L'imbroglio amoureux peut alors commencer avec son lot de quiproquos et ses situations burlesques. Le tout réglé sur un rythme infernal sans jamais que le spectacle ne s'essouffle. La légèreté et le spectaculaire (une fête de mariage complètement loufoque voire déjantée) côtoient l'intimisme du désespoir ou de la rageuse jalousie des personnages. Un mélange savamment dosé par la metteuse en scène Nina Russi qui nous fait passer du rire aux larmes. La scène de la fête d'anniversaire de Serse, avec ses costumes loufoques, ses personnages atypiques, et sa démesure, aura certainement été le highlight de la soirée.
➡️ CHANTILLY 12.X.2024
Concert floral à Chantilly : une merveille !
Pour faire écho aux Journées des Plantes du Château de Chantilly, le jeune festival de musique de Chantilly a invité les prestigieux Talens Lyriques dans un programme à la thématique florale absolument exquis et concocté spécialement pour l’occasion.
Une première partie d’airs de Georg Friedrich Haendel qui sentaient bon la rose et une seconde qui mettait en scène la rencontre sulfureuse entre un Apollon courtisan et insistant voire lascif et une Dafne fuyante, qui finira par se transformer en laurier afin d’échapper à son suborneur.
Deux chanteurs émérites pour illustrer cette rencontre : la mezzo-soprano Ambroisine Bré, ici dans un rôle de soprano et le non moins talentueux baryton-basse Nahuel Di Pierro. Tous deux nous ont fait vivre avec passion un jeu de séduction absolument irrésistible.
➡️ FRANCFORT 10.X.2024
Hercules minimaliste et sciemment avare
Du point de vue du décor : quatre planches (faites de panneaux de bois à l'état brut, marron clair) encadrent la scène et assise sur un canapé, la statue d’Hercules trône sur le côté droit de la scène. Dans la deuxième partie, un panneau, qui a été retiré, laisse entrevoir un morceau de ciel, le canapé a disparu et une nouvelle statue d’Hercules se tient debout, toujours sur le côté droit de la scène. Un rideau couleur crème recouvre toute la surface du panneau de fond de scène. Les costumes sont quelconques, voire laids pour certains.
Un spectacle volontairement resserré sur le drame et qui tente d'éliminer tout ce qui pourrait le parasiter (décors, costumes) pour se retrouver au plus proche des sentiments des personnages et de la figure d'Hercules (c'est le personnage qui a le moins à chanter, pourtant il est omniprésent et reste au cœur du drame). Voilà certainement les intentions du metteur en scène Barrie Kosky. Seulement, le résultat n'atteint pas vraiment la hauteur de ces louables intentions. Il donne plutôt le sentiment de décors à l'économie, d'une esthétique sabotée, de pauvreté des idées, de facilité voire de malhonnêteté intellectuelle.
➡️ ROYAUMONT 6.X.2024 Un festival qui se termine en Beauté
Le temps s'arrête à Royaumont
Le Triomphe du Temps, c’est le titre donné à cette dernière journée du festival de Royaumont : une façon de nous susurrer que tout touche certes à sa fin, mais que les graines des prochains concerts et donc du prochain festival sont déjà semées. Et la transmission est assurée (le jardin des voix de William Christie) au milieu de ce décor intact de vieilles pierres à l'âme musicale.
Deux concerts au programme : l’un entièrement consacré au clavecin avec un Francesco Corti survolté, l'autre lyrique avec le bijou de Haendel, l'oratorio Il Trionfo del Tempo e del Disinganno.
SEPTEMBRE 2024
➡️ FROVILLE Finale du Concours de Chant Baroque 22.IX.2024
Une étoile est née : Lucija Varsic
La finale du concours de chant baroque de Froville n’a pas déçu. Un niveau particulièrement élevé cette année, et des chanteurs déjà confirmés pour la plupart. Le public, constitué de fins connaisseurs, a pu ainsi assister à une compétition particulièrement savoureuse, et voir se succéder de brillants artistes.
Six candidats (3 sopranos, 2 mezzo-sopranos et 1 contre-ténor) sont venus défendre valeureusement leurs chances en interprétant trois airs baroques choisis principalement parmi trois compositeurs : Monteverdi, Vivaldi et Haendel.
Nous retiendrons surtout le mezzo-soprano, voire le contralto, chaud et capiteux de Lorrie Garcia qui a obtenu une belle troisième place. Une artiste qui se produit déjà régulièrement avec l’ensemble qui accompagnait cette finale du concours : I Gemelli. Elle aura marqué le concours de son charisme et de sa forte présence scénique. Peut-être aurait-elle mérité une deuxième place. Mais le contre-ténor Arnaud Gluck, dont la voix nous a semblé encore un peu « verte », lui a ravi cette luxueuse deuxième place grâce notamment à un air de Bach qui a véritablement placé le public en lévitation. En effet, l’artiste a su créer l’émotion en prenant sa voix la plus éthérée et une mezza-voce particulièrement aérienne. Un air qui a sans doute fait pencher la balance en sa faveur car Lorrie Garcia chantait ce même air avec moins d’émotion. Notez que le contre-ténor a également obtenu un prix spécial de la part de l’ensemble I Gemelli.
Enfin, la première place a sonné comme une évidence. Nous avions déjà remarqué la mezzo-soprano Lucija Varsic tout récemment au concours Cesti d’Innsbruck et nous étions tombé amoureux de cette voix d’une rare élégance et l’avions placée grande gagnante. Pourtant Innsbruck en a décidé autrement puisque elle n’a pas eu droit au podium, mais a tout de même obtenu un rôle dans une production. Bien lui a pris de se présenter au concours de chant baroque de Froville puisqu’elle a fait l’unanimité : prix du public et 1er prix ! Dotée d’un mezzo souple et long, l’artiste s’est distinguée dans le cantar parlando limpide de Monteverdi, les méandres aisément déjoués de Bach et les vocalises faciles et brillantes de Haendel. Une artiste à suivre absolument.
Seul regret, le départ bredouille de la soprano Maud Bessard-Morandas qui aurait mérité un prix pour sa fougue communicative, son charisme, son soprano brillant notamment dans un ‘In Furore’ de Vivaldi de haute volée porté avec une fougue communicative par l'orchestre I Gemelli, dont le premier violon n'est jamais parvenu à trouver sa parfaite justesse.
Ruggero Meli
➡️ AMBRONAY 1er week-end du festival 13-15.IX.2024
L'émotion
BLESSED ECHOES - CHANSONS ÉLISABÉTHAINES
FRANCESCA CACCINI : LA LIBERAZIONE DI RUGGIERO DALL'ISOLA D'ALCINA
➡️ Liège 6 septembre 2024
Entre ciel et terre.
L'ensemble Musica Gloria ouvre la 67e édition du festival Les Nuits de Septembre avec enthousiasme.
Depuis 67 ans, le festival Les Nuits de Septembre (dans le cadre du festival de Wallonie) offre un large panel de concerts fort intéressants. Cette année, les festivités ont débuté en l’église Saint-Jacques de Liège, un large édifice à l’architecture gothique absolument somptueuse, ce vendredi 6 septembre 2024 avec un concert baroque entièrement dédié au compositeur Georg Friedrich Haendel. Au programme, les rares Chandos Anthems écrits entre 1717 et 1718 lorsque le compositeur devient « artiste en résidence » à Cannons, la demeure de James Brydges, Comte de Chandos, un aristocrate et un mécène. Il s’agit d’une série de onze antiennes dans lesquelles des psaumes sont mis en musique. L’ensemble Musica Gloria en proposait deux : la 10e, intitulée ‘The Lord is my light’ HWV 255, dans laquelle on peut entendre les éléments se déchaîner, ainsi que la 6e, intitulée ‘As pants the hart’ HWV 251b, dans laquelle une foi indéfectible en Dieu est louée.
Ensemble Musica Gloria
AOÛT 2024
➡️ SALZBOURG 21 août 2024
Les Contes d'Hoffmann au cinéma
Mariame Clément a souvent le chic pour trouver les concepts ingénieux qui vont valoriser et pimenter les ouvrages opératiques auxquels elle s’attaque. On repense par exemple à sa géniale Agrippina et sa contextualisation tout droit sortie de la mythique série américaine Dallas. Avec ces Contes d’Hoffmann salzbourgeois, elle reprend le contexte cinématographique et transpose l’opéra dans un premier temps dans l’envers du monde du 7e art : les entrepôts puis la cantine des artistes pour enfin se retrouver au cœur de tournages de cinéma. Son idée permet de créer toutes sortes de fantaisies et de rendre crédible des choses qui le seraient moins dans un autre contexte. Après tout, ces Contes d’Hoffmann ne sont que rêveries, introspection, pensées sublimées, poésie, etc… Le cinéma permet toutes les folies de l’imagination et finalement du livret de Jules Barbier.
Trois opéras scéniques et quelques concerts
JUILLET 2024
➡️ Festival du Haut Limousin 31 juillet 2024
Déambulations musicales dans les rues de Le Dorat : une journée passionnante avec l'ensemble Les Surprises
Concert de 11h : Porte-à-porte musical
Partis de l'Office de tourisme, nous voilà embarqués, de façon complètement inattendue, à la découverte à pieds de la jolie ville de Le Dorat en compagnie d'un guide mais aussi de deux talentueux membres de l'ensemble baroque Les Surprises. Ensemble, le public découvre les monuments, les commerces et certains lieux de vie de la ville. Un parcours complètement improvisé, au gré des opportunités, qui nous emmène chez le coiffeur puis chez la vendeuse de vêtements, sous les fenêtres d’une habitante collectionneuse de porcelaines, à la terrasse d’un café, ou chez des particuliers qui nous accueillent dans des jardins privés absolument somptueux, pour vivre des instants musicaux fugaces surprenants. Des moments de grâce où le temps semble s'immobiliser.
JUIN 2024
➡️ SAINT-MICHEL EN THIERACHE Catherine Trottmann & Marina Viotti 30.VI.2024
Deux somptueux récitals
Tous les ans, le festival de Saint-Michel en Thiérache jouit d’une programmation à se damner. Difficile de choisir l’un des cinq dimanches proposés. Après la venue exceptionnelle de Malena Ernman que l’on pensait définitivement sortie du circuit en ouverture du festival, c’est le dimanche 30 juin que se produisaient deux fabuleuses chanteuses lyriques : la soprano Catherine Trottmann et la mezzo-soprano Marina Viotti, accompagnées de deux ensembles pas moins fabuleux, en l’occurrence Il Caravaggio sous la direction de la claveciniste Camille Delaforge et Les Musiciens du Louvre sous la baguette de Marc Minkowki. Toutes deux se produisaient dans un programme presque exclusivement consacré au roi du baroque Georg Friedrich Haendel. Les amateurs de sensations fortes et de montagnes russes des sentiments n'auront pas été déçus de voyager dans cet univers où les passions et les sentiments sont délicieusement exacerbés. . .
➡️ HARDELOT Midsummer Festival 20-29.VI.2024
Un programme de haute volée avec des surprises
Chaque année, fin juin, le château d'Hardelot célèbre l'arrivée de l'été au son de la musique baroque. Ce festival au nom poétique inspiré par Shakespeare et sa pièce A Midsummer Night's Dream explore les liens musicaux qui unissent la France et la Grande-Bretagne. Il se déroule au sein du magnifique théâtre élisabéthain en bois édifié au pied des murailles du château et accueille les plus brillants artistes de la scène baroque actuelle dans une ambiance conviviale, détendue et d'amour pour la musique en général. Poursuivez la lecture ici
➡️ PARIS 20.VI.2024 Des Olympiades aux résultats inégaux
L’occasion était trop belle pour la manquer. Aussi le Théâtre des Champs Elysées a-t-il programmé ses propres Jeux Olympiques à quelques jours de l'ouverture des Jeux de Paris, avec l’opéra L’Olimpiade de Vivaldi, dans un spectacle imaginé par Emmanuel Daumas. Un décor de salle de sport avec testostérone, biceps et entraînements intensifs à profusion. Des athlètes survitaminés réalisent des figures techniques spectaculaires. En parallèle, le spectateur se retrouve au cœur de la Grèce Antique et ses créatures légendaires : le Minotaure, la pythie de Delphes… Difficile de suivre le lien de ces thématiques. D’autant que les costumes n’aident pas vraiment à clarifier les choses.
AVRIL - MAI 2024
➡️ VERSAILLES Mozart L'enlèvement du sérail 22.V.2024
Un conte digne des 1001 nuits
Spectacle entre rêve et réalité, entre bande dessinée et réalisme. Le spectateur passe aisément de la légèreté du conte des Mille et une Nuits d’Aladin et son tapis magique à des sujets plus brûlants actuels : le harcèlement de la femme et sa soumission à l’homme, la femme moderne qui se rebiffe et revendique sa liberté. L’homme macho est tourné en dérision. C'est une ode à la liberté.
Les couleurs sont chaudes et multiples tout comme les costumes flamboyants des choristes. Les décors sont simples et ingénieux à la fois. Belmont cherche le moyen de franchir la haute muraille des jardins du palais de Bacha dans lequel sa belle est emprisonnée. Une muraille qui prendra la forme d'un pont, celui du pont des soupirs peut-être, une fois que ses arches auront été élégamment ajourées. .
➡️ PARIS 21.V.2024 La très rare Berenice de Haendel enflamme le Théâtre des Champs-Elysées
En ce mardi 21 mai 2024, le Théâtre des Champs-Élysées proposait une rareté haendélienne : l’opéra Berenice. Oeuvre négligée, certainement pour son écriture inégale : certains passages frisent l’ennui quand d’autres réservent de très jolis moments de musique, le tout au cœur d’un imbroglio politico-amoureux.
L’ensemble Il Pomo d’Oro en proposait sa vision en version de concert rehaussée par une distribution de haut vol dans laquelle la jeune génération côtoyait l’ancienne. Le contre-ténor montant Paul-Antoine Bénos-Djian incarnait un Demetrio idéalement vibrant d’émotion, à la fois touchant et vindicatif, tandis que la mezzo-soprano Arianna Vendittelli enflammait la scène par son incarnation incandescente d’Alessandro, un romain épris de Berenice. Chacune de leurs interventions a été marquante.
➡️ LUCERNE Vivaldi Giustino 02.V.2024
Giustino et son divin psaltérion
Un mariage particulièrement festif vire exsangue suite à une déclaration de guerre. Voilà comment commence le spectacle imaginé par Markus Dietz et son équipe. La couleur blanche vire au rouge et la perfection d’un décor immaculé subit une destruction progressive. Le tout dans un imbroglio politico-amoureux plein de rebondissements. Le spectateur suit avec une certaine aisance les péripéties qui sont assez fidèles au livret de l'opéra de Vivaldi. Une fois n’est pas coutume, les protagonistes ne sont jamais livrés à eux mêmes et le spectateur profite d’une belle direction d’acteurs.
➡️ AUGSBOURG 27.IV.2024 Serse de Haendel : tentative baroque mitigée
Comme nombre de théâtres allemands, l’opéra d’Augsbourg possède sa propre troupe de chanteurs lyriques. Dans sa formation, elle s’efforce d’interpréter tous les répertoires. Aussi, les organisateurs ont-ils eu l’idée de monter un spectacle baroque en prenant une œuvre connue de Georg Friedrich Haendel, en l’occurrence Serse. Le choix s’est certainement porté sur cet opéra pour sa partition peu vocalisante (sauf le rôle-titre) au regard des autres opéras du Caro Sassone. Le rôle d’Arsamene par exemple ne présente, à priori, que peu de difficultés.
➡️ GÖTTINGEN Festival Haendel 13.IV.2024
Grandiose Deborah
Deborah, oeuvre monumentale et très rarement programmée. Aussi, BAROQUENEWS ne pouvait manquer cette occasion unique de s'en faire l’écho.
Un double événement, avec le retour de Nicholas McGegan dans la ville où il a si longtemps oeuvré en tant que directeur artistique. D'ailleurs, dès son entrée sur scène, le public lui a réservé un accueil des plus enthousiastes. Et le chef le lui a bien rendu car il est loin d'avoir perdu la main. Nous pouvons même dire qu’il a su enflammer l’œuvre par son sens du drame et nous faire vibrer tout au long d'un récit biblique qui se termine par l'exécution du tyran Sisera par la main de Jael. Elle feint de le recueillir et le cacher chez elle. Pendant son sommeil, elle lui clouera la tête à l’aide d’un pieu et d’un marteau ! Un récit qui n´est pas sans rappeller la Juditha Triumphans de Vivaldi.
➡️ GÖTTINGEN Festival Haendel 10.V.2024
Sarrasine : Un spectacle surprise
La mystérieuse création Sarrasine a enfin dévoilé ses secrets en ce jour de première au Deutsches Theater de Göttingen. En effet le programme du festival avait laissé plus d’un spectateur perplexe et dubitatif cette année face à une proposition restreinte, a priori moins alléchante pour ne pas dire moins ambitieuse qu’à son habitude, dont ce spectacle Sarrasine. Un pasticcio d’airs pour la plupart inédits (des airs alternatifs, écrits pour des reprises, pour des chanteurs en particulier, etc…) qui aura aiguisé les papilles des passionnés. Et ils n’auront pas été déçus. Certains airs ont fait sensation et les découvrir en live demeure une émotion particulièrement savoureuse. Le choix d’un livret français aura pu rebuter ou du moins intriguer certains.
GÖTTINGEN Festival Haendel 09.V.2024
Trionphal Trionfo del Tempo
Titre, certes facile mais tellement réaliste : un concert de haut vol par sa distribution mais surtout par sa direction. En effet, George Petrou sait souffler le chaud et le froid comme personne. Un tremblement de terre voire un tsunami semble vous submerger par moments. Les instruments solos sont de toute beauté en plus d’être touchants comme la partie d’orgue exécutée avec jubilation et maestria par Fernando Aguado ou le violon si sensible d’Elizabeth Blumenstock qui a terminé l’oratorio seule, perchée sur un tabouret au bout d’une plateforme devant un parterre de spectateurs en larmes.
GÖTTINGEN Festival Haendel 17.V.2024
Les 9 airs allemands : Haendel en toute simplicité
Concert sans prétention et un Haendel en toute simplicité. Quatre instrumentistes et le chef claveciniste Olivier Fortin forment l'Ensemble Masques pour porter la voix de la mezzo-soprano Sarah Romberger dans un cadre intimiste, celui de l’église St. Paulus de Göttingen. Une balade bucolique au travers des pièces instrumentales de Telemann et de Bach entrecoupées par le cycle de 9 airs allemands de Georg Friedrich Haendel, appelé 'Neun Deutsche Arien'.
FEVRIER 2024
➡️ KARLSRUHE Festival Haendel II & III.2024
Gala Haendel, 17.II.2024 ★★☆☆☆
Siroe, re di Persia, 24.II.2024 ★★★★☆
Ottone, re di Germania, 25.II.2024 ★★☆☆☆
The Triumph of Time and Truth - The Foundlinghouse, 29.II.2024
Récital Max Emanue Cencic - Airs pour Senesino, Gala final, 01.III.2024
Concert symphonique de la Badische Staatskapelle, 04.III.2024
➡️ LUXEMBOURG 08.II.2024 Joyaux sacrés de Mozart et Haydn : une flamboyante interprétation sous la houlette du chef William Christie.
Couplage fort intéressant que celui imaginé par les forces combinées du choeur des Arts Florissant et du Luxembourg Philharmonic : les Vêpres solennelles d’un Confesseur de Wolfgang Amadeus Mozart et Les sept paroles du Christ sur la Croix de Joseph Haydn. Deux œuvres sacrées, écrites presque simultanément. La première flamboyante à la gloire du Seigneur. La seconde, douloureuse, nous fait vivre les derniers instants de vie du Christ. Deux œuvres complémentaires mises en miroir ou en tension pour mieux souligner les différences et accointances stylistiques.
En abordant ces œuvres de la période classique, sensiblement proches du baroque, le Luxembourg Philharmonic sort de sa zone de comfort et réalise une interprétation raffinée, spectaculaire et émouvante à la fois sous l’égide du chef William Christie, spécialiste de musique baroque. Une combinaison gagnante, magnifiée par les interventions magistrales du chœur des Arts Florissants. A la puissance jubilatoire du troisième mouvement des Vêpres de Mozart s’oppose la fragilité et la douleur insufflée dans cette passion du Christ et qui ont saisi les spectateurs de la Philharmonie de Luxembourg.
JANVIER 2024
➡️ NAMUR 18.I.2024 Lore Binon, folies italiennes
L’ensemble Lingua Franca proposait un florilège de pièces lyriques et instrumentales baroques au Grand Manège de Namur en ce jeudi 18 janvier 2024. Il mettait à l’honneur des compositeurs italiens tels que Vivaldi, Scarlatti, Caldara, Handel, Sammartini ou encore Corelli. Handel n’était pas italien bien entendu mais son passage en Italie et ce qu’il y a composé a été déterminant pour le restant de sa carrière.
Contrairement à son titre: ‘Folies italiennes’, le programme ne s'est pas révélé si ‘fou’ que ça (on aurait pu s’attendre à des pieces ou des personnages empreints de démence telle la cantate de Haendel ‘Delirio amoroso’…). Comme le flûtiste et hautboïste Benoît Laurent l’expliquait au public namurois, le programme met plutôt en exergue le style baroque italien et ses changements de rythmes, ses irrégularités, ses passages inattendus. La sonate pour clavecin de Domenico Scarlatti en a été le parfait exemple avec son style ibérique qui relève presque du flamenco : on pouvait entendre les castagnettes dans le jeu fascinant de virtuosité du claveciniste Koneel Bernolet.
Quatre musiciens accompagnaient la divine soprano Lore Binon et chacun d’eux a pu se distinguer et démontrer son talent : le violoniste Jacek Kurzydlo a su enflammer la Folia de Corelli. Tube baroque absolu, lui et ses complices ont su faire swinguer ses contrastes ainsi que ses rythmes infernaux. Benoît Laurent, quant à lui, a marqué la soirée par chacune de ses interventions. Sa virtuose aisance au hautbois comme à la flûte a bluffé le public, notamment dans la pièce introductive à ce concert : la sonate en la mineur de Giuseppe Sammartini qui nous a fait passer par toutes les émotions : douceur, tendresse, liesse… Quant à Mathilde Wolfs, violoncelliste émérite, son jeu de variations dans l’air de Caldara ‘Pompe inutili’ nous a particulièrement touché. D’ailleurs cet air tiré de l’oratorio ‘Maddalena ai piedi di Cristo’ aura certainement été le highlight de la soirée. Véritable prière, la voix délicate et suave de Lore Binon nous a presque tiré les larmes. D’une manière générale, sa voix uniforme et claire, son timbre charmeur, la clarté du texte et son expressivité ont eu raison des diverses pièces ’amoureuses’ du programme : les élans enflammés et désespérés d’Ergasto dans la très rare cantate de Haendel ‘Languia di bocca lusinghiera’ ou bien les deux airs de Daphné qui tente de résister aux avances lascives du Dieu Apollon.
Pour clore ce programme du baroque tardif, l’ensemble Lingua Franca a remercié le public de son enthousiasme en lui offrant le divin ‘Domine Deus’ tiré du Gloria de Vivaldi dans une version inédite : une partie de violon en supplément afin que tous soient réunis pour cette dernière pièce. Du pur bonheur.
Ruggero Meli
Lore Binon, soprano
Ensemble Lingua Franca
➡️ PARIS GARNIER 25.I.2024 Un Cesare de bonne facture mais sans passion.
Reprise du spectacle de Laurent Pelly au Palais Garnier en ce début d'année. L'opéra Giulio Cesare de Georg Friedrich Haendel, dans lequel le contre-ténor Lawrence Zazzo et la soprano Nathalie Dessay, dans les rôles principaux, s’étaient distingués en 2011. Un spectacle qu'il est d'ailleurs possible de retrouver sur dvd.
L’opéra prend place dans les réserves d’un musée, dans lequel, statues et œuvres prennent soudain vie. Un procédé simple mais qui va permettre au spectateur d'être propulsé, d'un seul coup, en l'an 40 avant Jésus Christ et de revivre la fascinante aventure de Cléopâtre et Jules César, affublés de leurs costumes d'époque : toges, armures, boucliers, etc... Les techniciens et ouvriers du musée vont et viennent sur scène en déplaçant statues, toiles de maîtres et autres œuvres d'art. Ils n’ont pas conscience du drame qui se déroule à leur insu et vice versa. On apprécie alors les touches d’humour qui ponctuent tout le spectacle: les statues qui chantent, Cleopatra qui bloque un chariot que les ouvriers ne parviennent plus à pousser sans en comprendre la raison, les traces de doigts ou de mains qui apparaissent soudainement sur des vitrines à peine finies d'être nettoyées ce qui agace des ouvriers perplexes, Cleopatra poussée sur un diable, etc… On s’en amuse et l’on en rit de bon cœur. Le décor impressionne par sa monumentalité (la gigantesque statue couchée de Toutânkhamon sur laquelle Cleopatra fait une entrée magistrale) et le passage à des décors et costumes type XVIIIe siècle au deuxième acte plaît. Certes, la mise en scène imaginée par Laurent Pelly fonctionne plutôt bien, mais passée la moitié de l'opéra, l’ennui nous gagne, lassés de la redondance d’un spectacle qui a du mal à se relancer, à offrir de nouvelles idées et surtout qui manque cruellement de drame théâtral.
Côté distribution, ...