PARIS : Haendel Orlando 02.II.2025

Des décors somptueux pour un spectacle bien terne

Paris, Théâtre du Châtelet, dimanche 2 février 2025 à 15h

Georg Friedrich Haendel : Orlando, opéra en 3 actes sur un livret d’un auteur anonyme, inspiré de Carlo Sigismondo Capece, de Grazio Braccioli et de l’Orlando furioso de l’Arioste  

Orlando  Katarina Bradić, mezzo-soprano  

Angelica  Siobhan Stagg, soprano

Medoro  Elizabeth DeShong, contralto  

Dorinda  Giulia Semenzato, soprano  

Zoroastro  Riccardo Novaro, baryton-basse  

Avec  les élèves danseurs du Conservatoire Ida Rubinstein - Conservatoire à Rayonnement Régional de Paris 

Orchestre Les Talens Lyriques

Direction musicale  Christophe Rousset

Mise en scène  Jeanne Desoubeaux  

Décors  Cécile Trémolières  

Costumes  Alex Costantino  

Lumières  Thomas Coux dit Castille  

Chorégraphie  Rodolphe Fouillot  

Traduction des surtitres  Richard Neel  

Surtitrage  Lydie Pravikoff 

Nouvelle production 

Création 

Production du Théâtre du Châtelet 

En coproduction avec le Théâtre de Caen, l’Opéra National de Lorraine et les Théâtres de la ville de Luxembourg

ARGUMENT

Un noble chevalier, Orlando, est partagé entre son devoir de faire une guerre qu’on ne voit pas et son amour irrépressible pour la reine Angelica, en couple avec Medoro, un prince, lui-même aimé par une autre, Dorinda, bergère de son état. Tiraillés entre jalousie et frustration, chacun des personnages vit dans l’insatisfaction, jusqu’à l’intervention de Zoroastro, un magicien-philosophe.

Acte I
Il fait nuit. Zoroastro, étudie le destin d’Orlando en regardant les étoiles. Tant qu’il sera prisonnier de son amour pour Angelica, le héros ne pourra consentir à partir à la guerre. Dans la forêt, Dorinda, la bergère, pense à son beau prince, Medoro. Soudain, on entend des heurts : Orlando se bat pour sauver la vie d’une princesse.
Angelica, autrefois redevable vis-à-vis d’Orlando, a, elle aussi, déjà sauvé une vie : celle de Medoro dont elle est, depuis, éprise, et à qui elle a juré fidélité. Medoro déclare à Angelica qu’il partage les mêmes sentiments mais il n’a pas le courage d’éconduire Dorinda.
Dorénavant, Angelica et Medoro éprouvent le même dilemme. Zoroastro attire l’attention d’Angelica sur la réaction qu’aurait Orlando s’il était informé de cette trahison. En réaction, Angelica feint la jalousie et accuse Orlando d’en aimer une autre qu’elle. Le héros nie et se dit prêt à tout pour lui prouver qu’il l’aime, elle. Les deux amants, Medoro et Angelica, fuient lorsqu’ils sont surpris par Dorinda, à qui ils avouent leur amour.

Acte II
Dorina est désormais seule et triste. Elle révèle le secret qui lui a été confié par les deux amants. Orlando devient furieux et promet de se venger d’un tel affront. Zoroastro place Angelica et Medoro sous sa protection : il leur conseille encore de fuir et de ne se laisser guider, l’un et l’autre, que par la raison.
Soudain, Orlando surprend Angelica mais elle disparaît aussitôt, grâce à l’intervention de Zoroastro. À cause de sa jalousie, Orlando sombre dans la folie. Maintenant, il se croit en enfer.

Acte III
Angelica a donné rendez-vous à Medoro dans la maison de Dorinda mais elle disparaît mystérieusement. Quand Orlando fait son apparition, il confond Angelica avec Dorinda. Dorénavant, Zoroastro utilise la magie pour sauver Orlando. Lorsque Dorinda apprend à Angelica qu’Orlando a détruit sa maison en enterrant vivant Medoro, Angelica défie le héros. Orlando, désespéré, croit avoir tué tous les protagonistes et sombre dans un profond sommeil.
Zoroastro fait apparaître les amants, vivants, et proclame le triomphe de la sagesse.

          Amateurs de beaux décors, de costumes baroques et d’ambiances vaporeuses, cet Orlando devrait vous plaire. L’élégance et le raffinement d’une salle de musée pour vous accueillir, des tableaux XVIIIe pour vous ravir, et un décor qui va progressivement laisser place à des espaces mystérieux, voire féeriques. Des paysages à la Turner, de toute beauté. Le spectateur en prend plein les yeux. Pourtant, ces décors à l’esthétique léchée ne suffiront pas à racheter un spectacle confus, terne, fastidieux, imaginé par Jeanne Desoubeaux, qui confinera même à l’ennui. Comble de déception, la folie légitimement attendue dans cet opéra, jamais ne se produira véritablement. 

Un groupe de scolaires déambule dans les salles du musée et chahute allègrement jusqu’à se perdre dans le dédale des salles. Leur professeur repartira sans se rendre compte que quelques enfants sont restés enfermés dans le musée. Ceux-ci côtoient les œuvres qui s’animent soudainement et s’incarnent. Les personnages historiques font revivre leurs aventures aux enfants. Rêve ou réalité, les enfants se réveillent au petit matin accueillis par des parents morts d’inquiétude mais heureux de retrouver leur progéniture. L'idée, fort séduisante, laisse place pourtant à peu d’actions intéressantes, le spectacle piétine et jamais ne passionne.

          Nous gageons alors sur la distribution pour compenser l’ennui suscité par la mise en scène mais là encore la déception nous gagne. A commencer par l’Orlando de Katarina Bradic, à la projection limitée, et aux vocalises marmoréennes. Ça ne décolle pas, même pendant la scène de folie, qui nous laissera bien perplexes ! 

Siobhan Stagg incarne une charmante Angelica et nous a gâtés de quelques brillantes cadences, sans pour autant passionner. Idem concernant le baryton Riccardo Novaro qui se révèle efficace dans le rôle de Zoroastro, mais ne fait pas pour autant d’étincelles dans l’air virtuose ‘Sorge infausta’. Reste heureusement la Dorinda de Giulia Semenzato, qui a su, ça et là, donner du peps à son personnage avec notamment des da capo et des cadences audacieux. Last but not least, le Medoro d’Elizabeth DeShong nous a enfin fait dresser l’oreille. Son timbre chaud et naturel de contralto, la souplesse et la longueur de sa voix lui ont permis de faire de chacune de ses interventions (pourtant Haendel est resté bien sage vis-à-vis de ce personnage), des moments privilégiés, presque miraculeux. Que ne lui a-t-on pas confié le rôle titre ! 

Dans la fosse, Les Talens Lyriques et Christophe Rousset, grands spécialistes du Caro Sassone, nous ont gratifiés d’une interprétation soignée, propre et efficace, mais sans surprise. 

En cette dernière représentation, les créateurs du spectacle ont été accueillis par des applaudissements mais aussi par une salve de huées.

                                       Ruggero Meli

Quelques photos du spectacle :