Beaune, Basilique Notre-Dame, le vendredi 11 juillet 2025 à 21h
Georg Friedrich HAENDEL (1685-1759) : La Resurrezione HWV 47, oratorio en deux parties sur un livret de Carlo Sigismondo Capece
Angelo : Suzanne Jerosme, soprano
Maddalena : Céline Scheen, soprano
Cleofe : Margherita Maria Sala, contre-ténor
San Giovanni : Thomas Hobbs, tenor
Lucifero : Thomas Dolié, baryton-basse
Le Banquet Céleste
Depuis son changement de direction, le festival international d'opéra baroque de Beaune fait peau neuve. il a perdu une partie de son nom 'et romantique' pour revenir aux fondamentaux : la musique baroque uniquement. En revanche il a conservé son appelation 'international', désormais un contresens puisque le festival a décidé de n'inviter que des ensembles français : en atteste le programme 2025. En revanche, la longue tradition Haendel est toujours au rendez-vous bien heureusement.
C'était le cas avec la première oeuvre au programme de ce deuxième weekend du festival : La Resurrezione de Georg Friedrich Haendel. Un petit chef-d’œuvre de composition où quasiment chaque air pourrait devenir un tube. Cet oratorio de jeunesse nous relate le combat entre l’Ange et Lucifer et le témoignage poignant des trois jours qui séparent la mort du Christ de sa résurrection au travers de trois personnages : Cleofe, Maddalena et San Giovanni. En ce vendredi 11 juillet 2025 dans la Basilique Notre-Dame, l’ensemble Le Banquet Céleste nous en proposait une version à mi chemin entre œuvre théâtrale et religieuse. En effet, ne pas théâtraliser à l'excès l'interprétation tout en conservant le caractère mystique de l'oeuvre semble avoir été le parti pris par l'ensemble à l'image de l’air ‘Cosi la tortorella’ dans lequel l’attaque de l’oiseau de proie, que l’on peut entendre à l’orchestre, était nettement moins marquée que ce que l’on a pu connaître avec d'autres ensembles. Certaines interprétations poussent nettement l'oeuvre vers la théâtralité opératique. Nous pensons notamment à celle de Julien Chauvin et son Concert de La Loge, entendue récemment (pour ne citer que celle-ci) avec notamment des effets théâtraux spectaculaires et avec le show phénoménal mené par Robert Gleadow en Lucifer. Il n’en demeure pas moins que la version du Banquet Céleste nous touche par sa délicatesse et sa ferveur religieuse. Une ferveur que l’on retrouve notamment dans l’interprétation d’une Céline Scheen que l’on n’attendait pas forcément dans ce répertoire, et qui même avec une drole d'émission parfois et quelques minauderies, s’est montrée passionnante en conférant une intensité inhabituelle au personnage de Maddalena qu’elle a ensoleillé de sa voix 'Ho non so che nel cor'.
Il y a trois mois, l'ensemble donnait l'ouvrage au Théâtre de Tourcoing avec une distribution légèrement différente avec notamment l'excellent contre-ténor Paul-Antoine Bénos-Djian qui avait véritablement magnifié le rôle de Cleofe. Avec le contralto chaud et capiteux de Margherita Maria Sala nous n'acvons pas perdu au change. Touchant 'Piangete, si piangete' avec ses notes qui tombent da
son timbre chaud et velouté, sa sensibilité mais aussi une virtuosité tout à fait bluffante. Après tout, le rôle avait été créé à Rome par un castrat, les femmes étant interdites par un arrêté papal. Habitués à entendre une contralto ou une mezzo-soprano dans le rôle, la voix de contre-ténor apporte davantage de relief à la distribution surtout avec la voix suave de notre artiste. Nous retiendrons particulièrement l’air très contrasté ‘Naufragando’, qui à lui seul allie la plus douce des prières à la virtuosité la plus échevelée. Un pur régal.
Malgré un timbre un brin nasillard et quelques notes aiguës tendues, Thomas Hobbs, dans le rôle de San Giovanni, a su apporter toute la tendresse nécessaire à un rôle si délicat notamment dans les airs ‘Cosi la tortorella’ ou plus encore dans le divin ‘Caro figlio’.
Avec sa voix bien timbrée, bien projetée et pleine de mordant, le baryton-basse Thomas Dolié confère panache et prestance au rôle de Lucifer. Les notes aiguës sont éclatantes, les graves un peu moins. Il faut dire que le rôle ne révèle jamais autant toute sa noirceur qu’avec une basse profonde.
Enfin Nardus Williams, une spécialiste du compositeur, prête son timbre fruité, lumineux et consistant au rôle de l’Ange. Avec calme et sans effort apparent, elle vient à bout des redoutables vocalises de son air d’entrée ‘Disseratevi o porte d’Averno’.
Mention spéciale aux interventions de certains membres de l'orchestre, notamment le violoncelliste Julien Barre qui a eu fort à bien faire.
Déjà on nous annonce que l'ensemble va proposer un autre des oratorios de Haendel la saison prochaine. A surveiller.
Ruggero Meli
Le Banquet Céleste
Céline Scheen
Margherita Maria Sala
Thomas Hobbs
Suzanne Jerosme
Thomas Dolié