AMBRONAY premier week-end 13-15.IX.2024 : l’émotion 

LE STABAT MATER DE PERGOLÈSE

45e FESTIVAL D'AMBRONAY    

VENDREDI 13 SEPTEMBRE 2024 - 20H30 ABBATIALE 



BRUNO DE SÁ, contre-ténor sopraniste

RÉMY BRÈS-FEUILLET, contre-ténor contraltiste

{OH!} ORKIESTRA 

violon et direction : MARTYNA PASTUSZKA

ŚLUBOWSKA, DOMINIKA MAŁECKA, BARTŁOMIEJ FRAŚ, MARZENA BIWO, VIOLETTA SZOPA-TOMCZYK, violons 

DYMITR OLSZEWSKI, alto

 TOMASZ POKRZYWIŃSKI, violoncelle 

MICHAŁ BĄK, contrebasse 

ANNA FIRLUS, clavecin 

ANDRE HENRICH, luth

Deux contre-ténors contraires et pourtant complémentaires interprètent le Stabat Mater de Pergolèse au festival d'Ambronay

          Il fut une époque où le chef-d’œuvre devant l’Eternel de Pergolèse, en l’occurrence son Stabat Mater, était traditionnellement chanté par deux dames (une soprano et une mezzo-soprano) puis vint le temps d’une association femme / homme (soprano / contre-ténor). Il semblerait que la tendance soit maintenant inversée. C’était le cas du concert que proposait l’ensemble {oh!} Orkiestra sous la direction tonique de la violoniste Martyna Pastuszka au festival d’Ambronay ce vendredi 13 septembre 2024 en ouverture du festival. En effet, deux messieurs étaient à l’honneur : les contre-ténors ou falsettistes Bruno De Sá et Rémy Brès-Feuillet, respectivement sopraniste et contralto (ou contraltiste). 

Dans une interprétation à mi-chemin entre profane et sacré, entre théâtralité et religion, les artistes nous ont offert une interprétation forte en émotion de ce Stabat Mater. En effet, certains moments, d’une grande fragilité, nous ont profondément touchés, comme le ‘Vidit suum dulcem natum’ chanté sur le fil de la rupture par Bruno De Sá, étonnamment sobre dans ce mouvement. Une mise à nu de la voix couplée à un léger vibrato pouvait s’apparenter à des sanglots. 

D’autres, en revanche, nous ont surpris par leur force dramatique, tel le duo ‘O quam tristis’, interrompu par une pause inhabituelle de quelques secondes puis repris avec une tension appuyée de l’orchestre. 

          Ceci dit, d’aucuns auront apprécié la brillance et la prouesse technique (superbes trilles notamment) de Bruno De Sá et un peu moins celle de Rémy Brès-Feuillet, au son mat, un brin froid et avare de fioritures (notamment un ‘Quae moerebat et dolebat’ sans trilles).

          D’autres, au contraire, auront déprécié le côté ‘star’ de l’un et préféré la sobriété de l’autre. Toujours est-il que les deux voix se mariaient plutôt bien finalement, comme si les vases communicants avaient parfaitement opéré, comme si les défauts et les qualités de l’un étaient compensés par ceux de l’autre. 

          Saluons l’assurance de Rémy Brès-Feuillet, qui du haut de ses 26 ans, offrait une prestation solide, directe sans chichis, avec un timbre sombre de contralto peu commun et une diction impeccable. De son côté, Bruno de Sá nous a régalé de sa déconcertante aisance à décrocher les notes stratosphériques et les faire briller, rondes et fruitées, sans stridence aucune. Des qualités qu’il a pu mettre à profit essentiellement dans le motet de Vivaldi ‘In furore’ qui nous a fait passer par les montagnes russes avec un premier et un troisième mouvements virtuoses au possible et un mouvement intermédiaire d’une infinie délicatesse dans lesquels le chanteur brésilien nous a offert un feu d’artifice de notes aiguës. Un véritable rossignol avions-nous écrit lors d’un précédent récital. 

Saluons enfin la passionnante prestation de l'ensemble {oh!} Orkiestra sous l'ingénieuse direction de la violoniste virtuose Martyna Pastuszka.

          Quel dommage et quelle frustration que Rémy Brès-Feuillet n’ait pas eu la possibilité de nous proposer un motet solo et ainsi équilibrer le programme.

                                    Ruggero Meli

Photos Bertrand Pichène
Martyna Pastuszka, Bruno De Sá & Rémy Brès-Feuillet
Bruno De Sá
Rémy Brès-Feuillet
Rémy Brès-Feuillet& Bruno De Sá

BLESSED ECHOES - CHANSONS ÉLISABÉTHAINES

45e FESTIVAL D'AMBRONAY    

SAMEDI 14 SEPTEMBRE 2024 - 14H30 ABBATIALE 

Ensemble Près de votre oreille : 

Fiona McGown, mezzo-soprano 

Paul Figuier, contre-ténor 

François-Olivier Jean, ténor 

Cyril Costanzo, basse 

Simon Waddelle, luth et cistre 

Ronan Khalil, virginal 

Marion Martineau, viole de gambe 

Robin Pharo, viole de gambe et direction 

Un concert qui fait du bien

Les chanteurs de l'ensemble Ensemble Près de votre oreille
Robin Pharo, viole de gambe et direction
l'ensemble Ensemble Près de votre oreille
photos copyright Bertrand Pichène

           L’ensemble Près de votre oreille est venu à la rescousse de chansons élisabéthaines lors de ce concert de début d’après-midi en l’abbatiale d’Ambronay : un répertoire rare et peu défendu. Bien lui en a pris car le résultat nous a absolument conquis. Porté par cinq valeureux solistes aux voix suaves ainsi qu’une poignée d’instruments adaptés au répertoire (deux violes de gambe, un virginal, un luth et un cistre), le public a eu plaisir à passer par tous les sentiments : l’allégresse, la mélancolie, la facétie, l’amour…

Des pièces passionnantes à suivre, portées par l’ensemble Près de votre oreille, qui en donnait une interprétation réglée au cordeau (les ensembles étaient impeccables) tout en conservant fraîcheur et simplicité. Nous avons été surpris et fascinés par les qualités de chacune des interventions solo des choristes.

          La voix de la (mezzo-)soprano Fiona McGown nous a particulièrement séduit : ronde, naturelle, souple avec un joli timbre. La voix sonore du jeune contre-ténor Paul Figuier apportait une jolie couleur aux ensembles. De même, la basse Cyril Costanzo (découvert il y a quelques années dans un concert donné par le Jardin des Voix de William Christie) s’est brillamment distingué par son timbre suave et son expressivité. Mais la voix la plus fascinante aura certainement été celle de François-Olivier Jean, qui oscillait étrangement entre le contre-ténor et le ténor. Un entre deux absolument fascinant couplé à une propension à l’expressivité et la théâtralité. Un artiste à suivre. 

Bref, un concert passionnant dont les voix nous ont fait un bien fou.

                                       Ruggero Meli

NOUR / RÉCITS D'UNE VIE

45e FESTIVAL D'AMBRONAY    

SAMEDI 14 SEPTEMBRE 2024 - 17H00 Salle polyvalente 

NOUR / RÉCITS D'UNE VIE

ANASMA, DANSE 

ÉLODIE CHAN, ÉCRITURE, CHORÉGRAPHIE, MISE EN SCÈNE 

JUDITH CHOMEL, ILLUSTRATIONS 

ENSEMBLE CANTICUM NOVUM 

LUCE COURCEULLES, HARPE 

ALIOCHA REGNARD, NYCKELHARPA
HENRI-CHARLES CAGET, PERCUSSIONS 

EMMANUEL BARDON, CHANT ET DIRECTION

Une rêverie magique

          Une histoire qui n'en est pas une. Un songe qui vous fait voyager entre ciel et mer. Un spectacle qui allie subtilement la danse au chant, au rythme de créations musicales surprenantes et séduisantes. Des instruments fascinants comme la nyckelharpa maniée avec talent par Aliocha Regnard. une féerie qui nous apprend à dompter nos peurs et angoisses. Saluons Emmanuel Bardon au chant avec sa simplicité et sa sensibilité qui touchent, mais surtout l’infatigable et charismatique danseuse Anasma, dont la grâce et l'agilité ont contribué à faire de son personnage, une fascinante femme-enfant à l'irrésistible expressivité.
          Quelques moments forts sont venus ponctuer le spectacle comme lorsque l'enfant se débat au milieu des flots (un simple drap bleu agité et retourné) ou bien lorsqu'en quelques secondes on nous raconte toute une vie d'amour et de transmission entre un père et son enfant. En effet, l'enfant marche main dans la main, à côté de son père, puis grandit rapidement pour devenir le soutien d'un père diminué par l'âge. Des procédés simples et qui ne nécessitent que très peu de budget et qui pourtant sont d'une redoutable efficacité du point de vue émotionnel. 

NOUR nous a fait rêver et voyager avec cette petite touche de magie rare. 

                                                      Ruggero Meli

quelques photos du spectacle NOUR
photos copyright Bertrand Pichène

FRANCESCA CACCINI : LA LIBERAZIONE DI RUGGIERO DALL'ISOLA D'ALCINA

45e FESTIVAL D'AMBRONAY    

SAMEDI 14 SEPTEMBRE 2024 - 20H30 Abbatiale 

Francesca Caccini (1587-1641 : La Liberazione di Ruggiero dall’isola d’Alcina. 

Opéra de Francesca Caccini sur un livret de Ferdinando Saracinelli d’après le Roland Furieux de L’Arioste (Florence, 1625) 

I GEMELLI (ORCHESTRE) 

EMILIANO GONZALEZ TORO & MATHILDE ETIENNE, DIRECTION 

MATHILDE ETIENNE, MISE EN ESPACE

Une oeuvre sauvée par ses ensembles

           Un concentré d’opéra d’une heure et vingt minutes environ, donné sans entracte. Son intérêt réside surtout dans ses ensembles de toute beauté. D’ailleurs l’interprétation de l’ensemble I Gemelli et de ses solistes les a particulièrement magnifiés. 

          Dans cet opéra, on assiste à l'éloge puis à la chute progressive d’Alcina. Un spectacle mis en espace par Mathilde Etienne qui rend justice au livret d’une façon simple et lisible sans grande recherche ni subtilité : quelques pas de danse, une couverture au sol, etc…

          Heureusement, quelques costumes ont été créés pour l'occasion : celui des plantes matérialisé par une cape transparente du plus bel effet avec ses reflets verts, brillant à la lumière des spots de l’abbatiale, idem pour les étoles bleues.  

          La distribution réunissait de très belles voix notamment le vibrant Emiliano Gonzalez-Toro dans le rôle de Ruggiero ou le passionnant Juan Sancho dans celui de Nettuno et Astolfo, toujours aussi bon acteur que chanteur. 

          Les « petits » rôles aussi étaient bien servis notamment par les voix de Natalie Perez et Cristina Fanelli. Il n’y avait guère que la jeune soprano Amandine Sanchez qui manquait d’assurance et de conviction. Il faut dire qu'elle remplaçant au pied levé la soprano Mathilde Etienne souffrante.

          Convaincante prestation de la mezzo-soprano Lorrie Garcia qui incarnait la perfide Melissa avec son timbre sombre et sa véhémence. Seule Alix Le Saux, dans le rôle d'Alcina, nous a moyennement convaincu avec son timbre et son émission bien étranges et pas vraiment agréables. 

          A part quelques beaux ensembles, l'oeuvre est uniquement constituée de récitatifs accompagnés qui ont pu conduire certains spectateurs à un ennui certain. Cette Alcina de Francesca Caccini, mise à l'honneur sous couvert de parité, a certes le mérite d'être jouée et entendue mais est loin d'être un chef-d'oeuvre. 

                                        Ruggero Meli

Quelques photos du spectacle photos copyright Bertrand Pichène

LA MANDORLE

45e FESTIVAL D'AMBRONAY    

DIMANCHE 15 SEPTEMBRE 2024 - 11H00 salle Monteverdi

AMBRONAY JEUNES TALENTS : La Mandorle

"Rivalité franco-italienne"

Prélude, Allemande, Sarabande, Gavotte, Gigue, Menuet en trio 

I- Lentement - Allegro - Lent II - Allegro III - Piano IV - Allegro 

Allegro 2. Adagio 3. Presto - Adagio 4. Allegro 5.Adagio 6. Allegro 7. Allegro 

1. Larghetto - Adagio 2. Allegro 3. Adagio 4. Allegro

Ensemble La Mandorle  :
Victoire Delnatte, hautbois 

Clotilde Sors, violon 

Camille Sors, violoncelle  

Élodie Brzustowski, théorbe, guitare baroque

Fougueuse jeunesse

          Quatre jeunes filles fougueuses sont venues défendre la musique baroque italienne et française dans un programme savamment conçu pour mettre en exergue les influences de ces deux pays en Europe. Couperin côtoyait Haendel, Vivaldi ou de Visée avec des pièces venues brouiller les cartes de nos certitudes au point de ne plus savoir de quel style ou compositeur il s’agissait. Comme la pièce de Vivaldi qui ne ressemblait pas à du Vivaldi. 

          La bonne surprise est venue d’une chaconne de de Visée et son avant-dernier mouvement : une délicieuse sucrerie absolument irrésistible. 

          Un concert qui donne du punch, servi brillamment par quatre talentueuses artistes. Leur ensemble : La Mandorle, un nom à retenir.

                                          Ruggero Meli