Festival de Fénétrange, samedi 4 octobre 18h, Collégiale Saint-Rémi
Georg Friedrich Haendel (1685 - 1759):
Ouverture et marche (Ariodante)
duo 'Alma mia, dolce ristoro' ( Admeto)
duo 'Caro, cara, piu amabile beltà' (Giulio Cesare)
Sonate en sol majeur op. 5 n° 4 : Passacaille et Menuet
duo 'Bramo aver mille vite' (Ariodante)
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motet Dixit Dominus HWV 232, psaume 110 pour soli choeur et orchestre
Chantal SANTON JEFFERY, soprano
Séraphine COTREZ, mezzo-soprano
Maîtrise de l’Opéra national du Rhin (Luciano BIBILONI)
Les Paladins
Jérôme CORREAS, direction
Le concert donné hier soir à la Collégiale Saint-Rémi de Fénétrange offrait deux facettes parfaitement représentatives du génie de Georg Friedrich Haendel : son inspiration dramatique et son sens raffiné de la mélodie. La première partie, profane, rassemblait de lumineux duos d’amour tirés de divers opéras ; la seconde célébrait la ferveur sacrée avec l’un de ses chefs-d’œuvre absolus, le motet Dixit Dominus, fulgurant de modernité. Pour magnifier ces pages haendéliennes, le festival faisait de nouveau appel au fidèle Jérôme Correas et à son ensemble Les Paladins, ardents serviteurs de ce répertoire. Après une ouverture d’Ariodante tonique et vivifiante, les instrumentistes ont livré avec passion et souplesse des extraits de la sonate en sol majeur op. 5 n° 4, admirable d’équilibre entre tendresse et dynamisme.
Ils étaient rejoints par deux solistes lyriques : la soprano Chantal Santon Jeffery et la mezzo-soprano Séraphine Cotrez, réunies pour trois duos d’amour — deux célèbres (Ariodante et Giulio Cesare) et un plus rare, issu d’Admeto. Malgré un vibrato un peu large et parfois un certain manque de raffinement, Chantal Santon Jeffery a brillé par son énergie et son éclat. Sa projection généreuse et son goût des cadences hardies séduisent, même si quelques vocalises escamotées dans « Bramo aver mille vite » et une tendance à scander la ligne de chant, notamment dans « Et cum principium » du Dixit Dominus, ont quelque peu terni son aisance.
Séraphine Cotrez, quant à elle, s’est affirmée avec beaucoup de naturel dans le rôle masculin des duos. Sa voix longue, au timbre dense et velouté, tire avec fascination vers le contralto. Elle impressionne par la richesse du médium et la chaleur du grave. Son intervention dans le duo du Dixit Dominus, à la tessiture de soprano, a pris une couleur singulière : le tissage de sa voix sombre avec celle, lumineuse, de sa consœur a engendré un instant d’une fragilité miraculeuse. Sa fulgurante attaque dans le quatuor « Dominus » mérite également d’être saluée, tout comme son solo « Virgam virtutis », révélant une ferveur religieuse touchante, malgré quelques coupures dues à un souffle un peu court.
La plus belle surprise est venue de la maîtrise de l’Opéra du Rhin, dont les jeunes chanteurs, en nombre et en enthousiasme, ont apporté une fraîcheur et une intensité irrésistibles au Dixit Dominus. Malgré quelques légers flottements d’ensemble, leur engagement et leur éclat vocal ont magnifié l’interprétation incandescente de Jérôme Correas et de ses Paladins. Le final, d’une exaltation communicative, a été repris en bis sous les acclamations.
Cette soirée, éclatante de ferveur, clôturait le Festival de Fénétrange de la plus belle des manières. Elle s’est achevée par la visite du tout nouvel auditorium du château : un joyau architectural promis à un bel avenir. On murmure déjà qu’un concert du Nouvel An pourrait y être donné — voilà une perspective qui ravira les mélomanes.
Ruggero Meli